Chronique du jour : LES CHOSES DE LA VIE
Quand la démocratie de l'argent trahit la vérité !
Par Maâmar Farah
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Etrange
destin de l'Humanité en ces temps d'incertitude où la politique a été
remisée dans les vieilles malles poudreuses du grenier des souvenirs
pour laisser le pouvoir à la manipulation médiatique. La vérité et la
réalité sont des concepts éculés. Les médias de l'impérialisme
travaillent à créer une réalité virtuelle qui remplace la vraie réalité.
Par la manipulation. En voici deux exemples puisés dans l'actualité de
ces derniers jours.
Le premier a trait aux énormes difficultés éprouvées par Trump sur le
plan intérieur. Ce président présenta des choses intéressantes en tant
que candidat. Nous perçûmes dans ses promesses une rupture très nette
avec le système habituel du pouvoir américain. N'a-t-il pas annoncé
qu'il allait arrêter les guerres «inutiles» pour se consacrer à la lutte
contre Daesh ? N'a-t-il pas critiqué les politiques de ses prédécesseurs
et clairement reconnu que l'Etat islamique est une création de Mme
Clinton et de ses sbires ? Ne s'est-il pas prononcé pour la fin de
l'OTAN ? Pour un rapprochement avec la Russie ?
Mais voilà que le gentil Trump se transforme en faiseur de guerres. Oui,
lui aussi !
Ces Américains sont étonnants ! Trump, impopulaire comme jamais,
n'arrivait pas à réunir une majorité, y compris dans le camp des
Républicains, pour faire passer ses lois ! Presse, justice et hommes
politiques le critiquaient sévèrement. Que faire ? Mais, pardi,
redevenir un bon Américain, c'est-à-dire un cow-boy décidé à chasser les
peaux rouges et à brandir les armes pour faire parler la poudre, le seul
langage que comprennent les «méchants». Une recette toute simple.
N'est-elle pas bizarre cette démocratie qui refuse le langage de la paix
et applaudit aux bruits de la guerre ?
Désormais, Trump est un bon Président. Tuer les autres, aller à des
milliers de kilomètres faire tonner les armes, voilà les programmes que
l'on vénère aux Etats-Unis. Et pourquoi donc ? Pour remplir les poches
des industriels de la guerre, rassurer le peuple qui, visiblement, ne
veut pas d'un mou qui ne tire pas rapidement, et le premier !
Evidemment, pour en arriver là, à cet unanimisme à peine perturbé par
quelques énergumènes défilant sous les gratte-ciel, avec des pancartes
choquantes, il fallait faire jouer les sentiments, en allumant le feu de
l'émotion. Pour cette population qui ne sait plus faire la différence
entre la réalité et la fiction, bernée un siècle durant par les
bêtifiantes sucreries hollywoodiennes, les images deviennent LA réalité
! Un montage astucieux exhibant des enfants aux torses nus, tous beaux,
angéliques, morts en levant les bras vers je ne sais quel sain
invisible, baignant dans l'ambiance du Dernier Jour, comme dans un
tableau de Leonard de Vinci ; un montage pour arracher des larmes et des
désirs de vengeance appelant à punir le coupable. Le gaz, bien sûr. Une
arme de destruction massive, un produit prohibé... Et là, deuxième
étonnement de ma part : cette grande intelligence qui crée des miracles
et sonde les mondes lointains, cette puissance technologique avérée,
sèche curieusement quand il s'agit d'inventer de nouveaux scenarii qu
justifieront de nouvelles agressions. Revenir à la fiction de 2003 et
des fausses preuves présentées devant le Conseil de sécurité ! Autant ce
grand pays étonne par ses créations futuristes dont nous recevons,
partout, des applications pour notre travail et nos relations sociales,
autant il devient minable quand il s'agit de se renouveler dans la
manipulation de l'opinion !
Au lieu d'attendre les résultats de l'enquête qui allait prouver
l'implication des soldats barbus de Washington dans ce drame, on passe
rapidement à l'épisode suivant, celui des Tomahawks tirés dans la nuit
vers les cibles «ennemies» ! On se dit «bis repetita», CNN, images vues
et revues, matraquage, Baghdad sous une pluie de bombes dans une autre
nuit d'un autre printemps noir... Mais ça, c'était pour une autre
génération. Il faut rappeler à la nouvelle, celle de Facebook et de la
soudaine pauvreté des ouvriers, que le cowboy veille, qu'il ne dort
pas... Rassuré par le bruit des armes qui tonnent au lointain, le bon
peuple peut dormir tranquille. Son Président a vengé les petits anges du
petit film monté par les cinéastes de la manipulation, ceux qui
dramatisent cinématographiquement les exécutions de Daesh, avec des
décors et des montages dignes des grands films fantastiques de
Hollywood. Ne cherchez plus ! C'est la même école et ceux qui imaginent
ces scenarii savent que le téléspectateur est friand de Mad Max, de 4X4
juchés d'armes lourdes, arrachant au désert ces traînées de poussière
jaunâtre qui rappellent les espaces infinis des westerns ! C'est la même
école qui invente à chaque épisode une nouvelle manière de tuer, faisant
reculer l'horreur un peu plus: ce pilote jordanien, prisonnier dans sa
cage, au milieu d'un paysage chaotique où prirent place des ombres
noires disposées comme dans les chœurs antiques, est brûlé vif sans
pouvoir s'échapper des flammes... Cette autre victime est enfermée dans
une autre cage que l'on plonge dans une piscine et les caméras sadiques
trouvent un malin plaisir à filmer la mort atroce, comme dans les
studios d'Hollywood... Un autre corps balancé du neuvième étage d'un
immeuble. Les égorger ? Mais c'est du vieux cinéma et ce n'est pas digne
d'Hollywood. Face à ces images, des têtes qui retiennent rapidement ce
qu'il faut retenir parce que les codes, le récit, les décors retracent
sur les pointillés de l'imagination des situations vécues au cinéma. Y
a-t-il une différence entre la réalité et la fiction ?
L'autre exemple de la manipulation orchestrée par les maîtres du jeu est
celle qui tente de déstabiliser Mélenchon en France. Voilà un candidat
dont on louait les compétences et dont on suivait avec un intérêt réel
la remontée spectaculaire dans les sondages. Personne n'avait dit que
son programme était un danger pour la France. Personne n'y avait relevé
des excès propres aux mouvements d'extrême gauche. Au contraire, les
médias insistaient sur la mise à niveau de ce programme, devenu plus
lisse, plus adapté à la conjoncture... Mais, le Mélenchon qu'on veut est
un bon Mélenchon qui sera juste un trouble-fête mais qui restera
tranquille au moment où les ténors doivent passer. Ceux que le système
veut. Ceux que les banques et le capitalisme financier sponsorisent.
Ceux qui vont continuer à appliquer les directives du pouvoir
supranational de Bruxelles, ceux qui se courberont devant les sionistes,
ceux qui iront prendre des directives chez Merkel, ceux qui répondront
«prêts» aux injonctions de la Maison Blanche... Et Mélenchon, avec un
pourcentage qui le rend capable d'arriver au pouvoir, n'est plus le bon
Mélenchon ! Parce que, justement, lui, propose tout à fait autre chose
et ça plaît au peuple ! Alors, comme un seul homme, les agents du
système entament leurs manœuvres pour décrédibiliser l'homme. Du
président de la République aux éditorialistes et animateurs des plateaux
de télé, en passant par les patrons du Medef et les «observateurs», tout
le monde lui tombe dessus. Il fait peur ! Le message passe cent, mille
fois par jour, sur toutes les chaînes... Et quelles chaînes ? Toutes
appartiennent à ces patrons que dénoncent quotidiennement Mélenchon, ces
milliardaires qu'il veut «appauvrir» de quelques centaines de milliers
d'euros pour équilibrer les budgets et aider les familles laminées par
l'Europe des riches, à retrouver un peu d'espoir. Même dans les journaux
télévisés, il apparaît de moins en moins et, quand on le montre, c'est
pour reparler et reparler encore de son «communisme», de ses liens avec
Cuba, les mouvements bolivariens et... Poutine !
Les Français sont-ils différents des Américains ? On le verra ce 23
avril...
M. F.
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