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Les médias français face à la nouvelle Algérie

 

Par Naoufel Brahimi el Mili
Le fabuleux sursaut des Algériens, le 22 février, a surpris toute la classe politique algérienne et bien au-delà. La résignation du peuple, attendue et espérée par le pouvoir en place, s’est très vite démentie par la présence pacifique de millions de contestataires dans toutes les rues du pays. Vite effacées les images de la Coupole où des partisans célébraient une nouvelle candidature d’Abdelaziz Bouteflika. Tout le gotha politique algérien réuni autour d’un portrait géant du chef de l’Etat, à qui un micro est tendu. L’image sans le son. Le ridicule teinté de surréalisme a mis le feu aux poudres. Personne n’a vu cela venir. En France encore moins.
Invité sur les plateaux de télévision et de radio, surpris comme tout le monde, je m’étais donné à un calcul arithmétique simpliste (UGTA,FLN, RND…) influencé par une mauvaise appréciation d’un mouvement naissant, je pensais que le passage en force pour un cinquième mandat était encore possible mais il sera confronté plus tard à une crise très grave. Avec les 10 millions de manifestants du vendredi 8 mars, le doute n’était plus permis. Sur un autre plateau, je disais que seules les modalités de l’après-Bouteflika restaient à définir en tenant compte de la rue, désormais acteur principal de la vie politique algérienne. A partir de là, de nombreux journalistes ne voulaient que connaître le nom du prochain Président. Questions de flic ? Nom, prénom et adresse ? Alors les questions de fond sont laissées de côté. Journalistes et politiques français se mettent en vain à la recherche d’un leader de cette dynamique. Et pour cause ! Les Algériens veulent un véritable changement : «Système dégage», faut-il le rappeler ? Un grand journal du dimanche consacre un entretien à Gilles Kepel, présenté comme expert du monde arabe. Sur un ton docte, il livre son idée forte : «On voit mal où sont les forces démocratiques qui prennent le relais .» Ces propos sont publiés après la journée du 15 mars où le chiffre des manifestants est de l’ordre de 20 millions. Les deux tiers du corps électoral dans la rue sont dans un angle mort pour cet expert en généralités approximatives. Il n’est pas le seul, hélas.
De nouveaux interlocuteurs représentatifs de cette inattendue et formidable dynamique doivent être désormais écoutés.
La France doit les identifier et surtout elle se doit de sortir des sentiers battus encombrés par des opposants de moins en moins représentatifs. Justement, l’enjeu et la difficulté pour les autorités françaises est de mieux connaître la nature de ces mouvements et leur profondeur. Par habitude ou bien par prudence, Paris tend les oreilles et les micros aux figures connues et installées depuis de nombreuses années. Elles sont audibles chez les politiques et les médias français alors que la rue algérienne ne veut plus les entendre.
Par réflexe, aussi bien au Quai d’Orsay que dans les salles de rédaction parisiennes, presque aucun effort n’est fourni pour déceler ces porte-voix qui ne sont pas nouvelles dans la société algérienne. Faute de moyen, ils ne sont pas sur les radars français pourtant ils sont présents en permanence aux manifestations à travers tout le pays. Qui en France a entendu ou encore moins observé le travail de fond réalisé par l’Observatoire citoyen algérien ?
Une entité, parmi d’autres, très engagée depuis de nombreuses années sur des sujets sociétaux. La nouvelle dynamique ne peut que briser le huis clos dans lequel ces associations et énergies étaient enfermées faute de moyens. Il s’agit de nouvelles forces démocratiques non encore identifiées par les habitués du café de Flore. C’est le moment ou jamais pour les diplomates et journalistes français de mettre à jour leur carnet d’adresses en accord avec l’épatant sursaut que connaît le pays. Il est temps pour la France de cesser d’agir comme cet officier de la police pétainiste qui dans le film «Casablanca» n’arrête que les suspects habituels. Le temps des opposants habituels est révolu.
Nombreux sont les journalistes à évoquer les visas refusés pour conduire à bien leur travail d’investigation sur place. Cependant, avec internet et les réseaux sociaux, les visas sont presque devenus une formalité administrative superfétatoire. Ils se posent d’innombrables questions sur le rôle de l’armée. Il suffit de constater que les militaires ne cherchent pas d’affrontement avec la rue. Bien au contraire. L’armée, qui, après avoir menacé implicitement la population, déclare par la voix de son chef d’Etat-major, le 10 mars, date de retour du Président après un long séjour dans un hôpital surplombant le lac Léman, que «l’armée et le peuple ont la même vision d’avenir». Apparemment, l’ANP ne veut pas faire débarquer Bouteflika avant la fin légale de son mandat : le 29 avril. Toute action dans ce sens serait considérée hâtivement comme un coup d’Etat. En revanche, une intervention militaire invitant poliment Abdelaziz Bouteflika à se retirer autour du 28 avril, en lui disant : «Monsieur le Président, merci d’être passé nous voir», serait interprétée comme une action visant à faire respecter la Constitution. Sur le papier, c’est le scénario idéal. Le sablier se vide peu à peu mais pas l’espérance.
N. B. E. M.

 

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