On fait quoi, sans le couvre-feu ?

Il paraît qu’il n’y a plus de couvre-feu à partir d’aujourd’hui. Sérieux ? Parce qu’avant ça, il y avait un couvre-feu ? Il paraît qu’il y a même des Algériens qui ne savent même pas si… leur wilaya est concernée par cette mesure. C’est que les Algériens qui ne regardent pas le JT de l’ENTV, ils sont nombreux, plus nombreux que tout ce que vous pouvez imaginer. Et ceux qui la regardent ne se sentent pas forcément obligés de se concentrer au moment où on commence à énumérer les wilayas où va s’appliquer le couvre-feu, à une cadence effrénée comme si le préposé à la lecture de la souvent longue liste est « poursuivi par un fauve », tous crocs dehors. Parce que pour être vraiment attentionné et intéressé par ce genre d’exercice dont le moins qu’on puisse dire est qu’il n’est pas un moment de plaisir, il faut vraiment comprendre l’enjeu et s’y sentir concerné. Ce n’est apparemment pas le cas de cette mesure, surtout qu’en dehors de ce « moment télé », on ne peut pas dire qu’il y a beaucoup d’indicateurs du couvre-feu. D’abord parce que les Algériens n’ont pas de vie nocturne, ensuite, les services de police ont rarement été dissuasifs sur la question. Il se dit même que tous les arguments passent comme une lettre à la poste quand il s’agit de justifier sa faute par quelqu’un qui est pris en infraction. Et puis, il y a l’essentiel. Cette mesure, personne n’a encore compris comment, pourquoi et… par quel miracle, elle serait utile et efficace en termes de sécurité sanitaire, dans le cadre des mesures-barrières contre la Covid-19 et… tout le reste ! N’allez surtout pas croire que s’ils n’ont pas compris, c’est parce qu’ils ne veulent pas comprendre, qu’ils sont tous des incrédules, des tordus, des récalcitrants, des rebelles, des anars, des saboteurs ou même des schizophrènes à tendance suicidaire. Ils n’ont pas compris parce que personne n’a fait l’effort de leur expliquer, c’est aussi simple que ça. Parce qu’il doit bien y avoir une explication, tout de même ! Si, à Dieu ne plaise, il n’y en a pas et qu’on l’a quand même infligée aux Algériens, c’est grave. Et s’il y en a et qu’on n’a pas songé à la rendre accessible pour ceux à qui elle s’adresse au premier chef, c’est aussi… grave. Mais c’est le premier cas qui a été le plus largement admis. En tout cas, il a été le plus commenté, souvent avec humour et dérision, parfois avec beaucoup de génie créatif. Pour autant, ça n’a pas fait réagir ceux qui doivent nous expliquer. S’il vous plaît, pourquoi le couvre-feu ? Sinon, on fait quoi la nuit, maintenant qu’il n’y a plus de couvre-feu ? On va sortir… comme avant ?
S. L.