On l’appelait Taztoza et les moins de cinquante ans ne doivent pas le
connaître. Si ça se trouve, ils n’en ont même pas entendu parler. C’est
que la période de règne de Bouteflika a poussé le pays dans un tel
niveau de décrépitude morale que les épisodes antérieurs qui n’ont
pourtant pas été des exemples de rectitude ont été vite oubliés.
Pourtant, des personnages du genre, il y en a eu beaucoup, même si la
mémoire n’en retient que les plus emblématiques en la matière. Taztoza a
marqué la seconde moitié des années 1980. Surgi de nulle part, on l’a
découvert un jour avec le rejeton du Président Chadli dont il est devenu
l’homme de main, le prête-nom, le complice des affaires louches, le
compagnon des soirées fastueuses et le rabatteur des privilèges en tous
genres. Un jour, il se retrouve en prison pendant que son sponsor est
quelque part dans un pays latino… Depuis, on n’en a plus entendu parler.
Des Taztoza, il a dû y en avoir avant, seulement, on n’en a pas parlé.
Enfin, pas trop… Jusqu’à l’avènement d’Elbouchi. Les plus perspicaces,
les plus branchés et les menteurs maladifs vous diront tous qu’ils le
connaissaient bien avant, mais allez vérifier ça. Toujours est-il qu’Elbouchi
est devenue célèbre, a intégré les discussions de quartier et a fait un
sujet populaire, avec… l’affaire Elbouchi. Sinon, ses casseroles
immobilières, son empire-champignon et ses tentacules douteux, ce
n’était pas sur la place publique. Il a donc fallu du « hard », du très
lourd et une… conjoncture pour que les Algériens découvrent, ahuris,
qu’on pouvait aller si loin dans un trafic criminel, avec de tels
volumes et de telles… implications ! Comme Taztoza, on va finir par
l’oublier, si ce n’est déjà fait, parce que dans son sillage, il y a des
« belligérants » plus « intéressants » ! Plus tard, quand ceux qui s’en
souviennent encore raconteront cette histoire, ils vont d’abord avec le
sourire dans le coin de la lèvre de leurs interlocuteurs à l’évocation
d’Elbouchi. Ici et maintenant, on est déjà passé à… autre chose,
c’est-à-dire à quelqu’un d’autre. Le pauvre bougre oranais s’appelle
Guenfouda. Enfin, on l’appelle ainsi. Tous ceux qui sont devenus
prospères en empruntant des sentiers vertigineux et généralement en
servant des intérêts plus gros et forcément plus discrets, on hérite
toujours d’un pseudo, de préférence méprisant et vulgaire. « Guenfouda
», c’est quand même pas mal mais ça ne fait pas durer. Il paraît que
Guenfouda était… gardien de parking et c’est ès qualités qu’il a
introduit la faune glauque et pleine aux as de la nuit oranaise. Le
sommaire pédigrée que nous a livré la presse jusqu’à maintenant ne nous
apprend pas grand-chose sur lui mais nous avons appris à « imaginer »
les chemins de la fortune du genre. Guenfouda possède donc plusieurs
cabarets, touche à d’autres affaires et préside même un club de foot !
Pour autant, l’intérêt est ailleurs : il va nous livrer qui ? Allez,
Guenfouda, balance ton (tes) porc (s) !
S. L.
S. L.