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Rubrique Contribution

6e COLLOQUE CLUB ENERGY / Intervention de Nordine Ait-Laoussine La transition énergétique en Algérie : Une étape incontournable pour assurer notre sécurité à long terme

6e Colloque Club Energy
 Sécurité et transition énergétiques

 «Pour une nouvelle politique inclusive et anticipatrice»
 Intervention de Nordine Ait-Laoussine

 La transition énergétique en Algérie
 Une étape incontournable pour assurer notre sécurité à long terme

 

Préambule
Je remercie le Comité d’organisation de m’associer à vos réflexions à partir de Genève. Je regrette, bien entendu, de ne pas être parmi vous après une longue séparation. Mon intention est de vous faire part de mon point de vue sur la situation actuelle du secteur énergétique national, sur les grandes incertitudes auxquelles il est confronté et sur ses perspectives d’avenir. Mon intervention est axée sur la nécessité d’une «nouvelle politique inclusive et anticipatrice», pour reprendre le thème choisi pour cette nouvelle rencontre.
Les responsables du secteur font de leur mieux pour atténuer les effets d’une crise multidimensionnelle sans précédent. Je tiens à saluer les actions de redressement en cours, même si je considère qu’on pourrait mieux faire. Je veux aussi féliciter le Comité d’organisation d’avoir planté le décor avec sa «concept note» qui couvre bien les différentes thématiques du débat. Cette note rappelle, en effet, sans complaisance, les facteurs de menace auxquels notre pays est confronté et nous invite à réfléchir sur les principales mesures qu’il convient d’envisager pour desserrer les contraintes actuelles. Elle permet ainsi d’entrer dans le vif du sujet : comment assurer la sécurité énergétique du pays à l’horizon 2030 pour le moyen terme et 2050 pour le long terme ?
Nous sommes tous conscients du fait que l’industrie mondiale des hydrocarbures est confrontée à une menace existentielle, même si certains d’entre nous doutent encore de la fin prématurée de l’ère du pétrole et du gaz. Nous sommes tous, ou avons été, des professionnels du secteur et, à ce titre, nous devons accorder quelque crédit au diagnostic dressé par les nombreux rapports d’experts et des institutions internationales ainsi qu’aux différentes feuilles de route envisagées pour réduire l’impact de l’industrie des hydrocarbures sur le réchauffement climatique. Nous sommes donc capables, en principe, de faire la part des choses, de déceler les tendances et d’anticiper les ruptures. Il reste que l’immense majorité des scientifiques pensent que les problèmes liés au réchauffement climatique sont bien réels, qu’ils sont dus à l’activité humaine et qu’ils peuvent conduire à la fin de l’ère du charbon, la baisse inéluctable de la consommation pétrolière à moyen terme et celle du gaz à long terme. Les experts sont unanimes : il convient d’ores et déjà de s’y préparer afin de ne pas compromettre l’avenir de l’humanité.(1)
Pour l’Algérie, ce qui importe le plus, c’est de s’adapter aux mutations énergétiques mondiales qui peuvent intervenir bien avant la fin du pétrole à l’image de ce que nous constatons visiblement aujourd’hui avec la multiplication et l’aggravation des désastres liés au dérèglement climatique pourtant annoncés depuis plusieurs décennies. Les pays producteurs d’énergies fossiles doivent toujours être conscients des implications à long terme du réchauffement climatique et engager, sans attendre, des mesures conservatoires concrètes sur le terrain avant qu’il ne soit trop tard.

L’industrie des renouvelables est en forte croissance(2)
La transition énergétique avance à grands pas un peu partout dans le monde et bouscule l’ordre établi à un rythme accéléré. Les énergies renouvelables jouent désormais un rôle primordial dans la génération électrique globale : leur capacité a connu une croissance vertigineuse depuis le début de ce siècle avec une augmentation annuelle de 6%. Celle du solaire, de l’éolien et de la biomasse a été encore plus spectaculaire : au cours de la même période, elle a été globalement multipliée par 10 au rythme de 15% l’an. Le photovoltaïque est devenu le leader de la transition avec une capacité atteignant 1'000 GW environ à l’échelle mondiale après les 200 GW de capacités nouvelles installées cette année. La capacité du photovoltaïque compte déjà pour 20% de la capacité d’électricité globale et devrait atteindre 30% à l’horizon 2030.
Dans le même temps, les progrès technologiques ont conduit à une réduction considérable du coût de l’électricité verte. Alors qu’il était supérieur de 15% au kWh produit dans les centrales à gaz il y a une dizaine d’années, il lui est aujourd’hui de 30% inférieur en Asie où les centrales les plus efficaces peuvent le produire au prix de 1.5 centime de dollar le kWh, auquel il faut ajouter le coût de son intégration au réseau de l’ordre de $0.30 centime/KWh.
Le basculement a été tout aussi brutal dans l’industrie de l’automobile. Les ventes de véhicules électriques connaissent là aussi une progression vertigineuse. Leur part de marché est de 20% en Europe et de 15% en Chine. Avec seulement 4%, les États-Unis sont à la traîne en attendant l’entrée en vigueur de la récente décision du Président Biden d’augmenter leur part de marché à 50% à l’horizon 2030. À l’échelle mondiale, la part de marché des véhicules électriques, qui a connu un bond considérable l’an dernier, atteindrait 6.4 millions d’unités cette année et, selon l’AIE, 55 millions d’unités en 2030.
Là aussi, des progrès considérables ont été réalisés au niveau du coût de construction des nouveaux véhicules qui seraient bientôt disponibles à un prix, grosso modo, proche des véhicules traditionnels grâce aux économies réalisées le long de la chaîne de production, notamment le coût de fabrication de batteries de longue durée. La baisse concomitante des coûts opératoires et des dépenses d’entretien, estimée selon l’AIE, à 40% par rapport aux véhicules traditionnels, devrait, en outre, augmenter l’attrait des nouveaux modèles. Cela devrait nous inciter à réduire nos investissements dans une filière appelée à disparaître à moyen terme.
Dans un autre ordre d’idées, alors que l’hydrogène était très peu évoqué dans nos réunions précédentes (sauf le plaidoyer de Belkacem Bennikous en 2012), il est considéré aujourd’hui comme l’énergie du futur par excellence. Il suscite de nos jours un regain considérable d’intérêt dans l’industrie en tant que source d’énergie propre qui pourrait se substituer au gaz dans certaines de ses applications. Notre regretté Abdelwahab Bennini était dans le juste, que Dieu repose son âme.
Ces trois exemples illustrent la rapidité avec laquelle le changement s’opère et peut s’accélérer. La soudaineté et le caractère inattendu des désastres que nous avons connus cette année, du fait des dérèglements climatiques, devraient nous encourager à changer de cap dès aujourd’hui en prévision du déclin, à terme, de la demande en énergies fossiles. A défaut d’actions concrètes immédiates, et en l’absence de politiques incitatives claires du gouvernement, nous risquons de compromettre l’avenir de nos enfants et des générations futures.

Le déclin de l’industrie pétrolière est bien réel(3)
La production mondiale de pétrole conventionnel a atteint son apogée en 2008. Depuis, la production globale d’hydrocarbures liquides a été partiellement soutenue par l’augmentation de la production de schistes américains, des pétroles lourds canadiens ainsi que l’apport non négligeable des condensats, du GPL et des bio-carburants.
Depuis le début de ce siècle, les grands groupes pétroliers se sont préparés à ce déclin, d’abord timidement, à travers la transition énergétique tout en poursuivant leur objectif de croissance et, ensuite, en réduisant leurs investissements sur toute la chaîne pétrolière sous l’effet de la crise sanitaire et de ses conséquences sur le déclin prévisible de la consommation pétrolière mondiale. Désormais, les grandes compagnies internationales poursuivent une stratégie sélective de croissance en se repositionnant sur des actifs plus compétitifs à court cycle de production et au moindre coût. Certaines ont annoncé qu’elles ne s’engageraient plus dans l’amont des pays où elles sont déjà en activité, alors que d’autres ont réduit leur plan de développement à long terme. Toutes redoutent la mise au rebut (stranded assets) de leurs actifs en amont.
Cette perspective n’augure rien de bon pour notre pays qui espère toujours relancer l’activité en amont en association avec des partenaires étrangers dans le cadre de la nouvelle loi qui comporte des avancées réelles tant sur le plan fiscal que sur le volet administratif. Son entrée en vigueur a cependant coïncidé avec l’arrivée du Covid, au moment où les grands groupes pétroliers ont décidé de réduire leurs investissements. Compte tenu du processus extrêmement long chez nous sur le long chemin de la négociation de nouveaux partenariats et du retard persistant dans la mise en production des nouvelles découvertes, les nouveaux barils risquent d’arriver trop tard en cas d’une détérioration plus rapide du marché pétrolier. Ce retard grève le prix de revient et risque de décourager les nouveaux investisseurs qui consacrent désormais l’essentiel de leur cash-flow au développement des énergies propres(4).

(Retour à (3))
Si cette tendance devait se confirmer, on pourrait tout au plus stabiliser la production nationale qui dépendrait alors essentiellement du niveau de l’apport financier de Sonatrach et, éventuellement, du Trésor public. Si tel devait être le cas, il faudrait alors réorienter la recherche de nouvelles réserves avant de recourir au forage systématique.

L’industrie gazière peut encore retarder son déclin (5*)
Le gaz naturel a mieux résisté à la crise sanitaire. La demande s’est révélée plus résiliente avec un déclin limité l’an dernier à 2% contre 9% pour le pétrole. Les prévisions à court et moyen terme tablent sur le retour, dès cette année, au niveau d’avant la pandémie alors que la consommation pétrolière n’a pas encore refait le chemin perdu.
Tout compte fait, la crise sanitaire a accéléré la transition énergétique au détriment du pétrole tout en améliorant, sans doute temporairement, les perspectives de développement du gaz naturel et notamment du GNL. C’est la raison pour laquelle les grands groupes pétroliers orientent le plus gros de leurs investissements dans la filière gaz, au détriment de la filière pétrole, à la faveur d’un mix énergétique alliant les énergies renouvelables, le gaz naturel décarboné et l’hydrogène vert.
L’industrie gazière peut donc retarder son déclin à condition qu’elle s’engage résolument à réduire ses émissions de gaz à effet de serre, pas uniquement au niveau relativement faible de la combustion du produit, mais celles des efflux de méthane libérés tout au long de son processus de production de la tête du puits au brûleur. En effet, une récente étude conduite sous l’égide des Nations Unies aboutit à la conclusion que 85 à 90% de ces émissions (y compris le gaz torché) sont libérés sous forme de méthane qui serait 80 fois plus nocif pour l’atmosphère que le dioxyde de carbone. Comme nous le verrons plus loin, son élimination progressive a, d’ailleurs, été convenue lors de la COP26. Dans son scénario extrême, l’AIE prévoit une décélération du taux de croissance de la demande gazière mondiale dans le courant de cette décennie.

Le paradoxe de la démarche énergétique actuelle(6))
Le moment me paraît venu pour orienter le débat vers une question fondamentale qui taraude tous les esprits. Elle résulte d’un paradoxe de notre démarche énergétique actuelle : celui d’une détermination à développer une industrie en déclin qui ne créé plus d’emplois, et notre hésitation à accélérer sur le terrain le développement d’une industrie florissante qui nous permettrait d’assurer, à la fois, notre sécurité énergétique à long terme, la diversification tant attendue de notre économie et donc la résorption du chômage (notre problème n°1). Pourquoi sommes-nous décidés à encourager la participation des capitaux privés étrangers dans les énergies fossiles en voie de disparition alors que nous n’arrivons pas à mobiliser concrètement la participation de capitaux privés algériens et étrangers dans des opérations de grande envergure pour valoriser notre potentiel exceptionnel dans les énergies renouvelables ?
La «concept note» préparée par le Comité d’organisation nous invite à débattre de nos différentes options. A mon avis, il ne s’agit pas d’affaiblir un secteur au profit de l’autre. Il s’agit de sauvegarder le rôle toujours déterminant des hydrocarbures dans notre pays et à déterminer le meilleur usage de nos réserves d’hydrocarbures encore disponibles. Il s’agit d’accélérer la transformation du pétrole brut en produits pétroliers et pétrochimiques à forte valeur ajoutée avec des spécifications conformes aux nouvelles normes internationales afin de protéger nos exportations et de continuer à les écouler sur le marché extérieur.
En définitive, notre priorité n’est plus de produire davantage de pétrole brut si nos exportations sont doublement restreintes par leur empreinte carbone et les quotas de l’Opep qui risquent d’être revus à la baisse. Notre priorité serait d’exporter davantage de produits finis, y compris le gaz associé à l’hydrogène vert. Dans cet ordre d’idées, notre pays a les moyens et les ressources de s’élever au rôle de principal fournisseur d’électricité verte vers l’Europe compte tenu de notre riche potentiel, de l’étendue de notre infrastructure et de la compétence avérée et l’engouement de nos jeunes opérateurs. Le capital privé local a un rôle primordial à jouer dans ce domaine aux côtés de Sonatrach et de Sonelgaz. Il faut l’encourager et l’intégrer pleinement dans l’effort au moyen d’appels d’offres incitatifs et transparents.
La tâche qui nous attend est immense, il faut s’y préparer sans complexe. Nous en sommes capables. Nous avons été des pionniers dans le développement de l’industrie au GNL, dans la réalisation de gazoducs en mer profonde, dans la refondation des rapports entre les sociétés nationales et les majors ainsi que dans la conception d’un nouveau type de contrats de vente de gaz naturel à long terme. Cette réussite a contribué au renom de notre pays au sein de l’Opep et sur le plan international.

Déterminer le meilleur usage des ressources disponibles(7)
Déterminer le meilleur usage de notre patrimoine énergétique fossile consiste d’abord à rationaliser notre consommation qui s’élève toujours au double de la moyenne mondiale pour produire la même richesse. J’espère que les travaux en cours au sein du gouvernement permettront finalement de substituer au régime actuel des subventions un système ciblé conforme à sa finalité qui consiste à aider les citoyens les plus nécessiteux.
Déterminer le meilleur usage de nos réserves d’hydrocarbures restantes consiste aussi à tirer le maximum des lourds investissements déjà réalisés, à augmenter notre marge avec ce qui existe. En un mot, il s’agit de réduire substantiellement notre coût de production pour stabiliser le plus longtemps possible le niveau de notre production pétrolière.
Déterminer le meilleur usage des ressources disponibles consiste également à sécuriser la qualité de nos exportations afin de protéger notre part de marché. Sonatrach doit tenir compte des nouvelles exigences de ses acheteurs en termes de conformité avec la protection de l’environnement. Un retard dans la décarbonatation de notre système de production d’hydrocarbures, y compris celle des infrastructures de transport et de transformation, gênera, tôt ou tard, l’écoulement de nos produits vers les marchés extérieurs. Nos exportations de GNL sont déjà menacées dans la mesure où Sonatrach devra éventuellement fournir des certificats de neutralité carbone de ses exportations. À défaut, elle s’exposerait à des rabais sur son prix de vente ou à une baisse de ses exportations. D’une manière générale, nos exportations d’hydrocarbures subiront, à terme, les effets d’une généralisation à l’échelle mondiale de l’imposition de taxes à la frontière (Carbon Border Adjustment Tax) sur nos produits si leur empreinte carbone est jugée inadéquate par nos acheteurs.
Plusieurs voies sont possibles pour réduire l’empreinte carbone des activités associées à l’exploitation et la mise en valeur de nos hydrocarbures. Il s’agira d’en établir un ordre de priorité en fonction de leur coût (et de leurs avantages) pour la société et du temps nécessaire à leur mise en application.
À première vue, l’acquisition de «crédits carbone», à travers la densification de la végétation et l’arborisation de la nature, paraît être la plus simple et la moins chère. Bien entendu, l’on cherchera à éviter les erreurs de conception et de mise en œuvre de l’expérience du barrage vert des années 1970. Ces crédits carbone pourraient être utilisés soit pour compenser nos propres émissions soit vendus ou échangés sur le marché international, ce qui nécessiterait la création d’un département ad hoc au sein de la division commercialisation de Sonatrach.
Viendrait ensuite la réduction du gaz torché, une opération déjà en cours chez nous, qui doit être accélérée pour réduire les importantes quantités encore perdues malgré les restrictions imposées aux opérateurs en amont. Selon la Creg, le volume de gaz torchés l’an dernier est presque aussi important que les quantités consommées dans l’industrie nationale.
La chasse aux émissions de méthane doit aussi être lancée et poursuivie sans relâche sur l’ensemble de notre infrastructure de production, de transport et de transformation notamment dans nos usines de liquéfaction où les besoins en gaz pour l’autoconsommation pourraient être couverts par l’électricité produite localement à partir des énergies renouvelables. Les crédits carbone qui résulteraient de leur élimination, même partielle, pourraient couvrir une bonne partie des investissements requis tout en améliorant notre empreinte carbone. Dans cet ordre d’idées, il faudrait tirer des leçons de notre expérience d’injecter le CO2 à In Salah en termes de coût final et sa compétitivité avec le procédé CCUS de séquestration et d’enfouissement du carbone afin d’examiner les possibilités de son extension ailleurs et de bénéficier des crédits prévus par le Protocole de Kyoto.
J’ai bien conscience que je suis loin d’avoir couvert l’immense étendue des voies que les progrès technologiques nous permettent d’envisager aujourd’hui pour réduire notre empreinte carbone. Je n’ai cité que celles qui me paraissaient évidentes chez nous. Il appartient à Sonatrach, qui est déjà impliquée dans la réduction de gaz à effet de serre, d’en faire une liste plus complète et d’adopter l’ordre de priorité qui lui convient afin de sécuriser ses exportations.

Les retombées de la COP26 (8a)
La transition énergétique vient de connaître sa première crise (ou sa première contravention pour excès de vitesse) avec l’augmentation inattendue des prix des énergies conventionnelles. J’ai assisté récemment à une conférence internationale réunissant les principaux acteurs de l’industrie énergétique mondiale ainsi que des experts de renom. La grande majorité des participants reconnaît que les transformations en cours sont en partie responsables de la crise actuelle, sans pour autant remettre en cause les bienfaits universels d’une industrie décarbonée. Le consensus qui s’est dégagé est que la transition conduira inévitablement à un renchérissement du coût de l’énergie et à plus de volatilité pour les consommateurs. Il a également été souligné que pour les producteurs d’énergie fossile, le coût de la transition sera extrêmement lourd et peut-être même inabordable.
La COP26 qui s’est tenue récemment à Glasgow a, malgré tout, réussi à renforcer l’Accord de Paris pour limiter le réchauffement climatique au seuil plus strict de 1,5 °C par rapport à l’ère pré-industrielle et à harmoniser l’action collective pour atteindre la neutralité carbone, si possible avant 2050 ou peu après. De nouvelles mesures ont été préconisées, parmi lesquelles :
- La réduction progressive du charbon dans la production d’électricité (vu leurs circonstances nationales, certains gros producteurs, comme l’Inde, la Chine, les USA, l’Australie et l’Afrique du Sud ne sont pas encore prêts à en concevoir l’élimination totale))
- La réduction des émissions de méthane soutenue par 105 pays avec l’objectif d’une baisse de 30% en 2030
- La fin progressive de la déforestation qui a reçu l’aval d’une centaine de pays, y compris le Brésil
- L’abandon, très controversé, des subventions «inefficaces» accordées aux combustibles fossiles sur lequel le débat reste ouvert (aucune référence spécifique à la réduction de la production pétrolière autrement que par le biais de l’élimination du carbone).
Le sentiment général qui prévaut aujourd’hui est que :
- La neutralité carbone à l’horizon 2050, affichée à ce jour par une cinquantaine de pays (représentant 70% environ des émissions globales) et un peu plus tard par la Russie, la Chine, l’Inde et l’Arabie Saoudite, sera difficilement réalisable ;
- à supposer qu’elle le soit, elle ne permettra pas de limiter le réchauffement à +1.5°C mais à une fourchette comprise entre +1.8 et 2.3°C ;
- les énergies renouvelables (solaire, éolien + biomasse) continueront à augmenter leur part de marché mais ne seront pas suffisantes pour assurer la neutralité carbone en 2050.

Les experts nous disent que pour atteindre cet objectif, il faudrait(8b)
- Accélérer l’élimination du méthane au-delà de ce qui a été convenu,
- investir massivement dans la séquestration du carbone et dans la production d’hydrogène
- laisser la porte ouverte à une contribution accrue du nucléaire pour combler le déficit.
Les experts nous disent également que la neutralité carbone serait de toute façon impossible au prix actuel du charbon thermique de $60/T (qui devrait, selon certains scénarios, atteindre $100/T) et sans une intervention massive des banques et institutions financières internationales dans le développement des énergies nouvelles, notamment au profit des pays sous-développés, dont certains sont déjà dépourvus d’un approvisionnement énergétique régulier.
Sur le plan politique, les principaux acteurs dont dépend le succès d’une transition énergétique véritable ne sont pas sur la même longueur d’onde. Nous avons, d’un côté, les 2 plus grands pollueurs de la planète, les USA et la Chine, qui préconisent l’accélération de mesures vers une transition verte et, de l’autre, les 2 plus importants exportateurs d’hydrocarbures, l’Arabie Saoudite et la Russie, qui s’opposent à une transition express qui consisterait, en définitive, à opposer les énergies conventionnelles aux énergies nouvelles alors que l’humanité a besoin de toutes les sources d’énergies sûres et abordables sans préjudice de leur origine.
Présentée à l’origine comme le sommet de la dernière chance, la COP26 n’a pas rapproché les points de vue des principaux acteurs. Elle a cependant le mérite d’avoir laissé la porte ouverte à des engagements plus ambitieux. Ceci dit, les futures rencontres et négociations ne devront plus faire l’impasse sur les considérations politiques qui doivent guider la recherche de compromis pour une transition «juste» et encourager l’augmentation et la concrétisation des flux de financement, de transfert de technologie et de renforcement des capacités d’adaptation au profit des pays en voie de développement.

Conclusion(9)
1. La transition énergétique n’est ni un mirage ni une malédiction. Je pense personnellement qu’elle est un mal nécessaire si l’on en croit les complaintes incessantes des opérateurs algériens qui déplorent toujours l’incohérence de notre politique de mise en valeur du solaire photovoltaïque.
2. Le moment est venu de poursuivre sans relâche et d’accélérer le développement des énergies renouvelables avant que ne prenne fin le confort relatif que la rente pétrolière nous a procuré jusque-là.
3. Après tout, la transition doit nous conduire à ce que nous avons toujours souhaité depuis l’indépendance, mais que nous n’avons pas été en mesure de réaliser complètement, à savoir la diversification de notre économie, le plein emploi et la sécurité de notre approvisionnement énergétique à long terme, pour ne citer que certaines des finalités visées par les mesures de nationalisation du 24 février 1971.
4. En attendant, la demande pétrolière mondiale atteindra inéluctablement son plafond. Peu importe si son timing sera différent selon les régions.
5. Les producteurs qui se distingueront avec un coût de production relativement bas continueront à exporter. Ceux qui, en outre, se mettront à l’abri des taxes carbone aux frontières, en réduisant leur propre empreinte carbone, s’en sortiront mieux en termes de prix de vente et de protection de leur part de marché.
N. A.-L.

 


(1)
Plan de présentation

- Introduction
- L’industrie des énergies renouvelables est en forte croissance
- Le déclin de l’industrie pétrolière est bien réel
- L’industrie gazière peut encore retarder son déclin
- Le paradoxe de la démarche énergétique actuelle
- Déterminer le meilleur usage des ressources disponibles
- Les retombées de la COP26
- Conclusions

(2)
L’industrie des renouvelables est en forte croissance

- Les énergies renouvelables jouent désormais un rôle primordial dans la génération de l’électricité.
- Augmentation annuelle de 6% de la capacité mondiale depuis le début du siècle (solaire + éolien + biomasse: +15% l’an).
- Avec une capacité de l’ordre de 1’000 GW, le photovoltaïque compte pour 20% de la capacité mondiale (30% en 2030)
Réduction considérable du coût de production de l’électricité verte (vers $1.5 centime/KWh en Asie).
- Les véhicules électriques connaissent une progression vertigineuse avec 20% du marché en Europe et 15% en Chine alors que les USA visent 50% en 2030.
- Le coût de construction des nouveaux véhicules se rapproche du coût des véhicules traditionnels avec, en perspective, une réduction de 40% des coûts opératoires et des dépenses d’entretien.
- L’hydrogène est considéré comme l’énergie du futur par excellence.

(3)
Le déclin de l’industrie pétrolière est bien réel

- La production mondiale de pétrole brut conventionnel a atteint son apogée en 2008.
- Celle des hydrocarbures liquides a continué à augmenter grâce aux apports du pétrole de schiste américain, du pétrole lourd canadien, des condensats du GPL et des bio-carburants.
- L’effondrement des prix et la crise du Covid ont conduit grosso-modo, depuis 2014, à une baisse de moitié des investissements en amont et au double des investissements dans les énergies propres.
- La relance de notre activité en amont en association avec des partenaires étrangers risque d’être retardée malgré les avancées de la nouvelle loi.
- La tendance des partenaires étrangers à privilégier le développement des renouvelables et leur réticence à s’engager dans des investissements dans les énergies fossiles n’augure rien de bon pour l’amont Sonatrach.
- On pourrait alors, tout au plus, stabiliser notre production qui dépendrait ainsi essentiellement du niveau de l’apport financier du Trésor public.

(4)
World Oil & Gas vs. Clean Energy Spending


(5)
L’industrie gazière peut encore retarder son déclin

- La crise sanitaire a accéléré la transition énergétique au détriment du pétrole tout en améliorant les perspectives de développement du gaz naturel.
- La demande mondiale de gaz naturel s’est révélée plus résiliente avec un déclin l’an dernier limité à 2% contre 9% pour le pétrole.
- Les grands groupes pétroliers orientent le plus gros de leurs investissements dans la filière gazière à la faveur d’un mix énergétique alliant les énergies renouvelables, le gaz naturel décarboné et l’hydrogène vert.
- L’industrie du gaz doit cependant réduire ses émissions de gaz à effet de serre tout au long de son processus de production, de transport et de distribution. Elle doit aussi se débarrasser des émissions de méthane, nettement plus responsables du réchauffement climatique que le CO2.
- Les analystes s’attendent à une augmentation continue de la demande mondiale de gaz naturel mais aussi à une décélération de son taux de croissance à long terme.

(6)
Le paradoxe de la démarche énergétique actuelle

- Nous sommes déterminés à développer une industrie en déclin, qui ne crée plus d’emplois, sans accorder la priorité au développement d’une industrie florissante.
- Nous sommes décidés à encourager la participation des capitaux privés étrangers dans les énergies fossiles en voie de disparition tout en négligeant les immenses possibilités de financements externes pour des opérations de grande envergure dans les énergies nouvelles.
- Il ne s’agit pas d’affaiblir un secteur au profit de l’autre, mais de sauvegarder le rôle toujours déterminant des hydrocarbures dans notre économie.
- Il s’agit de déterminer le meilleur usage de nos richesses à travers la transformation du pétrole brut en produits à forte valeur ajoutée et la mise en valeur du gaz naturel associé à l’hydrogène.
- En définitive, notre priorité n’est plus de produire davantage de pétrole brut si nos exportations sont doublement restreintes par leur empreinte carbone et les quotas de l’Opep qui risquent d’être revus à la baisse.

(7)
Déterminer le meilleur usage des ressources disponibles

- Rationaliser notre consommation en aménageant le régime actuel des subventions.
- Tirer le maximum des lourds investissements déjà réalisés.
- Améliorer notre marge sur les opérations en cours en réduisant notre coût de production.
- Sécuriser la qualité de nos exportations pour protéger notre part de marché
- Réduire l’empreinte carbone de notre système de production et de nos infrastructures de transformation, notemment dans la production du GNL
- Acquisition de crédits carbone
Elimination complète du torchage du gaz
- Réduction des émissions de méthane
- Protéger la nature et, d’une manière générale, améliorer la qualité de l’air
- Eviter l’imposition de taxes à la frontière sur nos produits dont l’empreinte carbone serait jugée inadéquate par nos acheteurs.

(8a)
Les retombées de la COP26

- Confirmation de l’objectif de limiter le réchauffement à +1.5°C.
- De nouvelles mesures ont été recommandées, de nouveaux engagements ont été pris.
- Le débat n’est pas clos sur des questions importantes, notamment en ce qui concerne la subvention des énergies fossiles, le timing de l’élimination complète du charbon ainsi que le niveau et les modalités du soutien financier aux pays sous-développés.
- Le sentiment général est que :
- La neutralité carbone ne sera pas réalisée au niveau global en 2050
- Elle ne permettra pas de limiter le réchauffement climatique à +1.5°C
- Les énergies renouvelables continueront à augmenter leur part de marché mais ne seront pas en mesure d’assurer la neutralité carbone en 2050

(8b)
Les retombées de la COP26 (suite)

- Les experts nous disent que cet objectif ne serait atteint qu’avec :
- Une disparition plus rapide du charbon
- L’accélération de l’élimination du méthane
- Des investissements massifs dans la séquestration du carbone et la production d’hydrogène
- L’augmentation graduelle du prix du charbon thermique
- Une aide massive des banques et institutions financières internationales au profit des pays en voie de développement
- Les principaux acteurs dont dépend le succès de la transition énergétique ne sont pas sur la même longueur d’ondes.
- Des compromis politiques doivent être envisagés pour assurer une transition juste et équitable.
- Les aides promises aux pays en voie de développement doivent être augmentées et concrétisées.

(9)
Conclusions

- La transition énergétique n’est ni un mirage ni une malédiction. C’est un mal nécessaire pour assurer notre sécurité à long terme.
- Le moment est venu d’accélérer le développement des énergies renouvelables car le confort que nous a procuré la rente pétrolière tire à sa fin.
- La transition énergétique devrait nous conduire à ce que nous avons toujours souhaité et que nous n’avons pas été en mesure de réaliser.
- En attendant, nous devons sauvegarder le rôle toujours déterminant des hydrocarbures dans notre pays.
- La demande pétrolière mondiale atteindra son plafond mais son timing sera différent selon les régions. Elle continuera à augmenter dans certains pays bien au-delà de 2050 pendant qu’elle déclinera ailleurs.
Les producteurs qui se distingueront avec un coût de production relativement bas continueront à exporter. Ceux qui, en outre, réduisent leur empreinte carbone s’en sortiront mieux en terme de protection de leur part de marché.

 

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