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Rubrique Contribution

Rachid Benissa, espoirs et combats d'un enseignant chercheur

Par Belhaouari Benkhedda, enseignant universitaire
La Kabylie ne cesse de nous surprendre et de nous enchanter, l’Amazigh, homme libre, n’a pas encore dit son dernier mot. Le professeur Rachid Benissa nous le confirme. L’enfant prodige d’Aït-Daoud est de retour sur sa terre natale après 28 années d’exil en France. Il revient en Algérie pour parler avec les siens de la berbérité, de l’arabité et de l’identité. Invité à l'Académie d'Athènes, il a montré que les Grecs, les Latins et leurs dérivés parlaient arabe et berbère sans le savoir. Rachid Benissa revient avec un trésor nommé L'Étymologie revisitée. 

Le parcours
Titulaire d’une agrégation d’histoire et de plusieurs licences en sciences humaines, le professeur a toujours été passionné par les mots. En faisant le tour du monde en un demi-siècle, il n’a pas perdu son temps. Joindre la science à la culture est générateur d’une force d’analyse, de création et d'innovation. Mais Rachid Benissa a aussi occupé des postes officiels, d’abord fondateur du Séminaire d'initiation à la pensée, ensuite secrétaire général du ministre de l’Éducation. 
Il a connu Mohamed Seddik Benyahia, Ahmed Kaïd, El Hadi Khediri et il a été l’élève de Malek Bennabi. Il est évident qu’il aurait pu faire une très belle carrière de haut fonctionnaire. Mais il a tenté de faire carrière dans l’enseignement, et il a réussi avec brio. Tout a commencé en 1962, quand il est parti en Syrie pour se perfectionner en arabe. Il a été surpris lorsqu’il a découvert que des mots kabyles figuraient dans l’arabe classique. C’était le déclic. Il était prêt à s'envoler aux quatre coins du monde pour suivre sa passion. Aujourd’hui, il est considéré comme une référence mondiale en sémantique lexicale.
 L’auteur est le produit de ses expériences, mais aussi de son enfance. Quand Rachid Benissa raconte ses souvenirs, on a l’impression de lire Le fils du pauvre de Mouloud Feraoun.       
  A Zemoura (Relizane), le village qui a bercé son enfance, il a connu un incident qui est resté gravé dans sa mémoire. En lisant une pancarte installée devant un jardin : «Interdit aux chiens et aux Arabes», le petit Rachid s’est senti humilié, il a été frappé par la terrible injustice de la colonisation et c’est là qu’il s’est révolté. Cette révolte a nourri la pensée du brillant élève qui a fréquenté le lycée franco-musulman de Tlemcen. 
Quelques années après l’indépendance, il ne pouvait plus se limiter à la pensée de Malek Bennabi. On ne peut pas être philosophe en connaissant seulement une philosophie. Il s’est intéressé aux courants philosophiques de l’Allemagne, de la Russie, de l’Inde et du monde musulman. 
En 1978, il entre, sur concours, à l'Unesco, à Paris. Ses missions à travers le monde lui ont permis d’examiner de près les sociétés humaines et d’apprendre plusieurs langues. 

Le combat 
Depuis le premier jour, il a dénoncé certaines pratiques de l’Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture. Il s’est tout d’abord étonné par le fait que 80% des employés de l’organisation étaient Français. En tant que fonctionnaire de l’Unesco, Rachid Benissa a vécu le drame bosniaque, c’est avec virulence qu’il dénonce le rôle négatif de François Mitterrand dans le conflit bosniaque. Rachid Benissa a vécu plusieurs expériences à l’Unesco, il a plusieurs fois critiqué les méthodes de travail de l’organisation. Mais il n’est pas le seul à avoir critiqué l’Unesco. 
Plusieurs penseurs ont dénoncé le despotisme des temps modernes. A travers son livre Machiavel pédagogue, Pascal Bernadin, enseignant diplômé de l'École polytechnique, démontre que les réformes émanant de l’Unesco sont imposées aux États pour modifier les valeurs des jeunes générations pour les déposséder de leur héritage culturel et en faire des citoyens du monde. 
L’héritage culturel est sacré pour Rachid Benissa. A travers ses conférences sur la généalogie des langues, il parle de Noé et de ses fils Hâm, Sam et Yâfes. Les références bibliographiques citées par le chercheur dévoué ne manquent pas de clarté. D’Hérodote à Benatia Abderahmane, ce sont des preuves irréfutables qu’il présente à propos de la genèse des langues. 
Dans son dictionnaire, il a inscrit des centaines de mots d’origine arabe et berbère, employés dans les autres langues. Il démontre que ces deux langues sont à l’origine de plusieurs langues et qu’elles sont parmi les plus proches de la langue parlée par Noé. Il est fier de parler de berbérité et d’arabité, tout en étant ouvert aux cultures du monde. En fait, Rachid Benissa incite ses concitoyens à préserver l’arabe et le berbère, mais aussi à apprendre l’anglais, la langue des sciences modernes et de l’innovation. 
Après avoir été sollicité pour donner des conférences à l'École polytechnique, l’École des hautes études commerciales et l'École normale supérieure, il a été invité à l’Académie d’Athènes. Mais aucun n’est prophète chez soi, disait Jean de La Fontaine. Parfois on lui pose des questions hors sujet ! Un frère musulman déguisé lui pose une question : vous avez rencontré Khomeiny ? Oui, j’ai rencontré Khomeiny, répond Benissa. Tonnerre dans la salle ! On aurait cru voir Robespierre
claironner : «Oui, j’ai vu Jean-Jacques Rousseau.» Ce dernier, contrairement à Voltaire, n’était pas partisan d’un système oligarchique (voir les conférences de l’historien Henri Guillemin sur Voltaire, Robespierre et Rousseau), c’est la raison pour laquelle Robespierre l’admirait. Rachid Benissa, lui, tout comme son ami Roger Garaudy, a dénoncé publiquement la prostitution politique de l’Arabie Saoudite, du Golfe et des «oulémas» serviles qui sacralisent la politique américaine visant à contrôler tout le pétrole du monde. Rachid Benissa est un homme libre et noble. 
B. B. 

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