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Rubrique Culture

Les rescapés de Pula de Saïd Saad Chacun pour soi et Dieu pour tous

Publié récemment aux Éditions du Net (France), le dernier roman de Saïd Saad s’intéresse au problème de l’émigration clandestine, un sujet d’actualité au vu de toutes ces flopées d’Algériens qui traversent la Méditerranée, au risque de leurs vies,  ur de frêles embarcations dans l’espoir d’atteindre les côtes européennes. 

Mokhtar n’en peut plus de voir sa vie en face. Vendeur à la sauvette au marché Tnache de Belcourt, ce trentenaire prend une décision radicale : tenter sa chance sous d’autres cieux. Facile à dire, mais pas à faire ! Après avoir essuyé plusieurs refus de visa, Mokhtar saute le pas. Il a un plan «B» : tenter une traversée clandestine. Pendant une année, le futur harrag fignole son projet. Fatah, un ami de Belcourt, doit l’accompagner. Lui aussi en a marre de végéter, en dépit de sa licence en commerce, obtenue après des études universitaires.
Seule ombre au tableau pour Mokhtar : laisser sa chère maman seule. Lalla Zineb a déjà perdu un fils et un mari. 
En effet, le père de Mokhtar, policier de son état, avait été assassiné par les hordes sanguinaires en 1994. L’autre crève-cœur, c’est Naziha. Mokhtar est très amoureux de sa jolie voisine et il souffre déjà de la laisser derrière lui. Il se dit que s’il avait un vrai boulot et de l’argent, il l’épouserait et lui ferait une ribambelle d’enfants. Mais ça, c’est une autre histoire !
En dépit de tous ces obstacles, Mokhtar ne veut pas renoncer à son rêve. Il tient absolument à découvrir l’Europe et y trouver le bonheur qui lui est refusé dans son propre pays. Comme tous ses copains qui l’ont précédé dans cette aventure périlleuse, il est prêt à se jeter à l’eau. Au préalable, il faut réunir la somme de 180 000 DA à remettre au passeur.
Le printemps est là et le jour «j» approche à grands pas. Son ami Fatah se désiste à la dernière minute. Mokhtar, lui, ne capitule pas. Il prendra la mer coûte que coûte. Il rédige une lettre d’adieu à sa mère : «Yemma, je te prie de me pardonner la peine que je te fais en quittant définitivement la maison. C’était plus fort que moi, ne m’en veux pas, il fallait partir. Je voulais t’en informer de vive voix mais je n’ai pas eu le courage de le faire de peur de te faire du mal. Demeurer ici sans perspective aucune était une chose inacceptable pour moi, traverser la mer restait la seule issue et j’assume ma responsabilité, sachant le danger que tout cela représente.»
Mokhtar quitte Alger pour Annaba. C’est là où il a rendez-vous avec le rabatteur. C’est à partir de cette ville de l’Est algérien que le départ vers les côtes italiennes est prévu.
 Plusieurs candidats à la traversée clandestine sont là, même une jeune maman flanquée de son enfant. L’embarcation  d’une capacité de 12 places fend la mer à 2h30 du matin. C’est celle de passagers peu nantis. Car, dans le même temps, une embarcation VIP, avec de riches commerçants à bord, amorce la traversée vers l’Europe.
Après moult péripéties, les clandestins débarquent au sud de l’Italie. Ils se séparent. Chacun pour soi, Dieu pour tous ! Les pas de Mokhtar le conduisent dans une ville où tout le monde le dévisage avec un mélange de curiosité et de méfiance. Dans les rues de Margherita di Pula, il erre sans but, tenaillé par la faim et perclus de fatigue. La peur de tomber nez à nez avec des policiers lui vrille le ventre. Il a le numéro d’un ami qu’il réussit à joindre via une cabine téléphonique. 
Zoubir habite à Milan. Il lui conseille de prendre le train et de le rejoindre dans cette ville du nord de l’Italie. Hélas, lors du trajet, il se fait choper par la police. Menotté, Mokhtar est jeté dans un fourgon cellulaire. Avec d’autres migrants clandestins, il est conduit dans le centre de rétention d’Elmas, situé  non loin de Cagliari. 
Tunisiens, Afghans, Syriens, Pakistanais, Congolais, Éthiopiens sont retenus dans ce camp en attendant leur rapatriement. Les conditions de vie y sont déplorables : insalubrité, malnutrition, humiliation, violence... «C’est son quatrième jour au centre, ou cinquième. Il ne sait plus. Il commence à perdre la notion du temps dans ce centre, une véritable prison à ciel ouvert. Pour ceux qui sont ici depuis plus d’un an, c’est un mouroir... Après avoir passé plusieurs jours dans ce centre, il constate de prime abord que les autorités européennes font preuve d’hypocrisie en appelant ces lieux ‘’centre de rétention administrative’’ alors que, pour lui, il ne s’agit ni plus ni moins que de prisons.»
Le jeune clandestin n’a pas fini de manger tout son pain noir. Les bobos s’enchaînent. Sa santé fait des siennes. Atteint d’une grave pneumonie, Mokhtar se surprend à rêver de son ancienne vie. Et si cet exil clandestin n’était qu’un mirage, un leurre, une illusion ? Saïd Saad est né en 1955. Traducteur de formation, il a longtemps travaillé comme journaliste. Il est l’auteur de Parfums d’une femme perdue (2010) et Les tranchées de l’imposture (2018).
Soraya Naili

Les rescapés de Pula. éditions du Net. 2021. 231 p.

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