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Rubrique Culture

LE MELHOUN REVISITÉ L’hagiographie dans la poésie melhoun, une ethnographie des grands saints de l’islam

Le corpus poétique du melhoun, constellé de nombreuses cantiques à la gloire des saints hommes de l’islam, reste, à l’évidence, une mine riche en instructions à propos des vies, voire du cheminement des augustes personnages appelés Awliya Allâh ou les bien-aimés de Dieu.
Et ce sont ces poètes, versés dans l’hagiographie, qui ont, par le truchement de leurs alléchantes versifications brodées dans un langage à la portée de tous, fait connaître un grand nombre de saints du monde musulman mais plus particulièrement ceux algériens. Appelé également Al-‘îlm al-mawhoûb ou la science infuse comme le nomment précisément les poètes eux-mêmes tels que le dit l’aède El-Arbi El Meknassi dans sa qacida La taqta’â liess (Ne désespère point), «îlm al-mawhoûb fesroûh awliya Allâh  (la science infuse est interprétée par les bien-aimés de Dieu), la poésie melhoun a, pour vocation, aussi, de mettre en avant une littérature qui sert à édifier un contact permanent entre le commun des mortels et les personnages ayant atteint des stations spirituelles élevées dans le dessein de faire une approche sémiologique et historique des différentes voies mystiques auxquelles appartiennent ces aèdes.
Loin de faire dans le culte anthropolâtrique puisqu’eux-mêmes fustigent ceux qui les accusent de l’être comme c’est le cas du poète Abdelaziz Al-Wazani qui, dans sa qacida Ya mesbah ez-zine où il dit : «La ta’âba bel djahdine fel mawhoûb» (N’accorde point d’importance à ceux qui sont portés au doute de la science infuse), les poètes du melhoun qui sont la «vox poetica populi» pour reprendre l’expression de mon ami, le chercheur Ahmed Amine Dellaï, ont tendance uniquement à porter aux nues ces saints hommes de l’islam. Parmi les saints les plus illustres qui ont fait un large consensus dans les écrits des poètes hagiographes du melhoun, l’on cite le saint Sidi Abdelkader Al-Jilâni (1078-1166), appelé également Boualem ou la’âradj et considéré à l’unanimité comme Soultane El-Awliya (le sultan des saints). Il en est le plus cité. Tous les grands poètes lui ont consacré dans leur diwan au moins une qacida à l’image de Mohamed Benmsayeb (mort en 1768) ou Abdelkader Bentobdji (1871-1948) qui lui a réservé tout un corpus panégyrique dont la célèbre qacida Abdelkader ya Boualem dhaq el hal ‘aliya (Abdelkader ô Boualem je suis dans le désarroi), reprise par Cheb Khaled. Dans le même ordre d’idées, l’on ne peut occulter le poète maghrébin Abou Farès Abdelaziz El Maghraoui avec sa poésie Ya soltane el ber wel bhar (ô sultan des terres et des mers), dédiée à Sid Abdelkader El-Jilani, où dès l’entame de sa qacida il va solliciter son secours en lui adressant ce vers : «Ya dhekkar djnani, en’ârni ya fayez el fkhar (Ô fertiliseur de mon jardin, sauve-moi, toi qui a acquis la grande fierté).»
Par contre, Sidi Mohamed Benmsayeb s’autorisera à composer une poésie destinée à rendre hommage à une kyrielle de saints et par laquelle il implora leur secours aux fins de le sauver des persécutions des soldats du Makhzen turc qui l’ont pourchassé jusqu’à sa retraite à Aïn El Hout où il s’est retiré chez son ami, le saint Sidi Mohamed Benali, et ce, en raison de ses écrits jugés fâcheux à l’encontre de la politique ottomane. C’est grâce à cette qacida intitulée El ghouthiya (la salvatrice), laquelle a pour refrain Ya ahl Allah ghithoû el melhouf (Ô gens de Dieu sauvez l’opprimé) que le poète tlemcenien a été sauvé, dit-on, d’une exécution ordonnée par le Hakem turc. Un miracle s’en est produit, affirment plusieurs sources concordantes, et Benmsayeb a pu échapper à sa mise à mort pour aller se réfugier au Maroc. Un autre pôle du soufisme et non moins fondateur d’une grande voie spirituelle, à savoir la Tidjania, est plusieurs fois évoqué dans les poésies du melhoun, sachant qu’un nombre élevé de bardes sont affiliés à sa tariqa. Il s’agit de Sidi Ahmed Tidjani, natif de Aïn Madhi, dans la wilaya de Laghouat (1738-1815). Parmi les poètes les plus illustres, entre autres, qui ont consacré leurs écrits à son honneur, l’on cite El-Arbi El Meknassi qui le nomme dans la plupart de ses écrits par Ould Salem, lequel patronyme n’est autre que le prénom de l’un de ses aïeuls. 
A ce titre, une qacida ayant pour titre «A’ataf ‘âni Oueld Salem» (Sois compatissant à mon égard ô Ould Salem), a été rendue célèbre par le chanteur Rachid Nouni qui lui a composé une charmante mélodie. El Arbi El-Meknassi ne s’est pas limité à cette œuvre et a même composé des cantiques expliquant la fonction et les pratiques de la voie Tidjaniya. El ighara lillah ghithna (Notre combat est pour Allah, sauve-nous)  en est une de ses poésies. C’est dire que ce n’est là qu’un fragment d’une anthologie ayant consacré des épitres à la gloire des saints hommes qui constituent un référent culturel très ancré dans la société algérienne d’où sa place dans le corpus poétique melhoun.
Mohamed Belarbi

 

 

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