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Mikail Houari, Président pour l’Afrique et le Moyen-Orient Airbus, au Soir d’Algérie : «Nous espérons étendre notre collaboration à l’ensemble des secteurs de pointe en Algérie»

Entretien réalisé par Ahmed Ammour
Mikail Houari, nommé au poste de président pour l’Afrique et le Moyen-Orient d’Airbus début 2017, succédant à Habib Fekih, a accordé un entretien exclusif au Soir d’Algérie dans lequel il dresse le bilan de l’activité du leader mondial de l’aéronautique, de l’espace, de la défense et des services associés, et évoque la position d’Airbus dans l’Afrique et le Moyen-Orient. En Algérie, en plus d’Air Algérie, il affirme vouloir étendre la collaboration à l’ensemble des secteurs de pointe afin d’accompagner le pays dans ses programmes de modernisation des capacités aériennes et spatiales à long terme. Ayant une excellente expertise acquise durant 25 années passées dans l’industrie, au niveau mondial, M. Houari, qui est à la tête d'une équipe en charge de conduire des opérations et conclure de nouveaux marchés sur la région, a commencé sa carrière chez Alcatel en Espagne, en Chine et en Amérique latine. Il rejoint, par la suite, Thales pour prendre en charge les affaires de la société en Arabie Saoudite avant de diriger les ventes globales des produits et services Scada. Il rejoint Airbus en 2005 en tant que vice-président pour l’Amérique latine. Il supervise alors la division «Défense et Aérospatial» du Groupe, avant de s’installer aux Emirats arabes unis en tant que responsable de la région Moyen-Orient. En 2011, il est désigné délégué général d’Airbus Group, puis prend le poste de vice-président pour l’Afrique et le Moyen-Orient. Il explique qu’au cours des quatre dernières décennies, Airbus a transformé le paysage aéronautique en Afrique et au Moyen-Orient en offrant des produits innovants et en nouant des partenariats durables dans l’industrie, le commerce et la recherche. Leader mondial dans le domaine de l’aéronautique, de l’espace et des services associés, Airbus s’engage à étendre sa présence et à promouvoir ses produits et services, qui favorisent la croissance économique et soutiennent les moyens de subsistance dans la région.

Le Soir d’Algérie : Airbus a réalisé de bonnes performances commerciales en 2019, avec une hausse de 8% par rapport à 2018, qu’en sera-t-il pour 2020 ?
Mikail Houari :
En 2019, nous avons livré 863 avions à près de 100 clients, ce qui constitue effectivement une augmentation de 8% par rapport à 2018. C’est la 17e année consécutive que nous observons une croissance de notre production, c’est un nouveau record ! Parmi ces livraisons, on observe une nette transition vers les versions re-motorisées NEO, plus économes en carburant et plus efficientes que les modèles précédents, ainsi qu’une livraison record de 173 gros-porteurs.
Au niveau du continent africain, Air Sénégal a reçu ses deux premiers A330neo, devenant la première compagnie aérienne africaine à l’opérer ; Air Seychelles a aussi reçu son premier A320neo et Egyptair son premier A220, un des derniers ajouts à la gamme de produits Airbus.
2019 constitue également une année record en termes de ventes, avec 1 131 nouvelles commandes dont 768 nettes, contre 747 en 2018, mettant en lumière l’enthousiasme des clients sur tous les segments de marché et permettant à Airbus d’atteindre un nombre cumulé historique de plus de 20 000 commandes nettes.
À la fin de l’année 2019, le carnet de commandes d’Airbus s’élevait à 7 482 appareils.
En 2020, notre objectif est de renforcer notre culture d’entreprise, améliorer nos performances opérationnelles et ajuster notre structure des coûts afin de renforcer nos performances commerciales et se préparer pour l’avenir.
Dans la lignée de l’augmentation générale du trafic aérien global, Airbus prévoit environ 880 livraisons on 2020.

Les commandes sur l’ensemble de la famille Airbus ont connu une hausse, hormis celle de l’A380 en recul, 8 contre 12 en 2018. Est-ce la conséquence de la décision de mettre fin à la production de ce très gros-porteur ?
Depuis un an maintenant, Airbus a annoncé l’arrêt du programme A380. Les livraisons d’A380 prendront fin en 2021, le temps d’honorer nos dernières commandes. L’arrêt de production de l’A380 se justifie par l’insuffisance du carnet de commandes, qui ne nous permet plus de conserver nos actuelles capacités de production. Toutefois, la réalisation même du programme a permis à Airbus de prouver sa capacité industrielle à mettre au point un appareil de très grande envergure.
L’A380 est une prouesse technologique et industrielle et les passagers du monde entier adorent voler à bord de ce formidable appareil. Gardez à l’esprit que l’A380 continuera à sillonner le ciel pendant encore de nombreuses années ! En parallèle, la hausse de commandes d’A350xwb et A330neo en 2019 par rapport à 2018 est un gage de reconnaissance pour notre famille extrêmement compétitive de gros-porteurs.

Quelles conséquences pour les salariés qui travaillent sur le programme de l’A380 ?
La production de l’A380 concerne au sein d’Airbus entre 3 000 et 3 500 personnes, sur un total de 134 000 salariés, soit l’équivalent de moins de 3% des effectifs totaux d’Airbus.
Au vu du dynamisme commercial des autres programmes du groupe, en particulier l’A320, l’A350XWB ou encore l’A220, la mobilité interne devrait permettre de nombreux transferts de postes. Environ 12 000 employés d’Airbus changent de poste chaque année, et avec l’actuelle montée en cadence des monocouloirs et l’augmentation de notre carnet de commandes de gros-porteurs, il existe de nombreuses possibilités de mobilité interne. Nous avons travaillé sur une feuille de route pour garantir une transition harmonieuse et une mise en place de services de reconversion spécifiques pour faciliter le redéploiement entre les fonctions et les
programmes.
Dans ce sens, nous venons d’annoncer notre décision de créer de nouvelles capacités de production pour l’A321 pour faire face à une forte demande qui atteint des niveaux sans précédent sur la famille leader A320neo, en particulier ses dérivés A321 long-courrier (Long Range (LR)) et très long-courrier (Xtra Long Range (XLR). D'ici mi-2022, l'usine Jean-Luc Lagardère, site d'assemblage actuel de l'A380 à Toulouse, abritera une chaîne d’A321. Ces nouvelles installations offriront une plus grande souplesse, tout en maintenant un niveau stable de la capacité industrielle globale des monocouloirs à Toulouse.

Airbus a été impacté par l’annulation d’une centaine de commandes en raison de la situation spécifique de certaines compagnies aériennes qui ont fait faillite. Ne craignez-vous pas de nouvelles annulations pour 2020 ?
Nous avons enregistré en 2019 l’annulation de 363 appareils, et ce, principalement pour des raisons spécifiques aux compagnies aériennes ainsi qu’à la décision de mettre fin à la production de l'A380. Ce constat est à relativiser, le marché continue de croître, et beaucoup d’acteurs sur ce marché présentent d’excellentes performances. Nous avons de solides relations de long terme basées sur la confiance et la fiabilité avec nos partenaires, fournisseurs et clients. Ces derniers étant en nombre limité, nous sommes toujours dans l’optique de chercher des solutions et de s’entraider dès lors que des problèmes se présentent.

Airbus entame une nouvelle génération avec les avions NEO pour «New Engine Option», avec des consommations réduites de 15% de carburant, notamment sur A320 et A330. Est-ce que vous allez la généraliser à l’ensemble de la famille Airbus ?
Les préoccupations environnementales sont une priorité chez Airbus. Elles influencent les décisions prises à haut niveau dans l’entreprise et définissent nos activités quotidiennes partout dans le monde. Notre approche pour limiter notre empreinte environnementale et respecter les objectifs fixés par l’Atag se base sur la considération de la totalité du cycle de vie de nos produits et services, de leur conception à leur recyclage. Nous sommes le premier constructeur à avoir reçu une certification environnementale sur tous nos sites, nos produits et nos services. Ayant en tête cette responsabilité, nous ne cessons d’innover et de développer des nouvelles solutions. Ces dernières concernent le design de nos avions, de nos moteurs et dispositifs d’extrémité de voilure, les «sharklets», ainsi que le programme Blade qui se penche sur de nouvelles formes d’ailes permettant de réduire la consommation de carburant. Nos recherches portent également sur des nouveaux types de carburant, ou encore l’usage de matériaux légers, naturels, ou composites, qui réduisent notre empreinte environnementale.
Ces innovations rendent ainsi les avions plus éco-efficaces et permettent une réduction de la consommation de carburant jusqu’à 25% sur l’ensemble de nos familles.
Récemment, nous avons également lancé de nouvelles innovations touchant la cabine qui permettent des économies en carburant.
En outre, notre ambition d’ici 2030 est de construire un avion entièrement décarboné.

L’ère de la mobility révolutionne le monde, y compris celui de l’aviation, avec les nouvelles technologies autonomes. Pensez-vous qu’un jour vous aurez des avions complètement autonomes (auto-pilotage) ?
Dans le cadre de ses recherches pour développer un avion plus autonome, Airbus vient de réussir le premier décollage d’un A350 en mode automatique grâce à un programme d’algorithmes couplé à un système de reconnaissance d’images. L’avion a donc décollé «sans les mains».
Pas question pour autant d’imaginer un cockpit sans pilote.
Les recherches sur les technologies autonomes ne sont pas une fin en soi mais sont primordiales pour soutenir les pilotes, leur permettant de se concentrer moins sur le fonctionnement des avions et davantage sur la prise de décisions stratégiques et la gestion de mission.
Elles rendent possible l’exploration de nouvelles innovations dans les domaines de l’électrification, de la connectivité et de la recherche sur les matériaux. Quoi qu’il arrive, les pilotes resteront au cœur des opérations.

Vous avez d’ailleurs développé le projet Airbus UpNext qui permet à un avion de rouler, décoller et atterrir par lui-même, sans l'aide de l'aéroport ou des systèmes satellites ou encore le projet de taxi autonome, décollage et atterrissage (Attol). Quels sont les projets futuristes d’Airbus ?
Airbus UpNext est notre division dédiée à l’innovation, qui imagine l’industrie aérospatiale de demain.
Airbus s’intéresse notamment à l’aviation électrique dans laquelle l’entreprise est pionnière avec l’initiative de l'Air Race E. Nous avons dévoilé lors du Dubai Air Show notre premier avion de course électrique qui participera à la première compétition mondiale du genre prévue en 2020.
Cette compétition stimulera le développement de technologies plus propres, plus rapides et plus innovantes qui pourront être appliquées aux véhicules urbains aériens et
dans un second temps aux avions commerciaux.
Airbus a également développé un appareil à décollage et atterrissage vertical (Adav) : CityAirbus, afin d’explorer le marché de la mobilité urbaine. CityAirbus est un appareil quatre places, également électrique, qui va dès à présent commencer sa campagne d’essais en vol, nous permettant de préparer le futur de l’aviation.
Pendant le Salon aéronautique de Singapour, qui a pris place mi-février, Airbus a présenté Maveric, un nouveau design disruptif d’avion créé pour réduire la consommation de carburant des futurs avions. Pour l’instant, ce prototype ne mesure que 2m de long pour 3,2 m d’envergure mais il se pourrait qu’à l’avenir, ce design soit généralisé à tous les avions, permettant une réduction de consommation de carburant de l’ordre de 20%, comparé aux configurations actuelles de monocouloirs. Maveric a effectué son premier vol en juin 2019, et va continuer sa campagne d’essais en vol jusqu’au second trimestre de 2020.

Airbus, dans sa stratégie d’internationalisation, présent dans 30 pays avec ses 1 500 fournisseurs, prévoit-il d’avoir une filiale en Algérie avec un centre de pièces détachées ou centres d'entraînement, entre autres, d’autant plus le président de la République se tourne vers l’encouragement du développement des start-up…
Notre objectif en Afrique est de positionner Airbus comme un partenaire et d’entrer dans une dynamique de coopération avec nos clients pour satisfaire leurs objectifs stratégiques. Ces alliances font émerger des talents locaux tout en créant des emplois, et améliorent in fine l’efficacité de la chaîne logistique globale d’Airbus.
Aujourd'hui, 35 constructeurs et prestataires de services africains sont représentés dans les chaînes d'approvisionnement d'Airbus. Sept d'entre eux sont implantés en Afrique du Sud, 16 au Maroc et 11 en Tunisie.
A ce jour, il n’y a pas un seul avion d’Airbus qui n’ait pas des pièces, des équipements ou des composants made in Africa. L'éducation et l’entrepreneuriat sont respectivement les éléments les plus ambitieux et les plus prometteurs de l'écosystème aéronautique et spatial émergent en Afrique. Avec la population la plus jeune du monde, l’Afrique dispose des ressources humaines nécessaires pour développer une industrie aérospatiale durable, si les investissements nécessaires sont effectués. L’Algérie est un marché important et nous y prêtons une attention toute particulière. Tout est possible, mais nous devons adopter une vision de long terme. Notre mission est d’orienter nos efforts globaux vers la création d’une d’expertise et de capacités, ce qui nécessite l’encouragement de la création de talents. Depuis son lancement en Afrique en 2016, notre initiative Airbus LittleEngineers a touché plus de 6 000 élèves à travers le continent.
Le but de ce projet, qui prend la forme d’une série d’ateliers qui touchent à la programmation, l’aérospatial et l’aéronautique, est d’encourager la jeunesse à étudier et comprendre les technologies et développer son intérêt pour les matières Stim (sciences, technologies, ingénierie et mathématiques). L’incubateur Airbus Bizlab a également lancé en 2017 une initiative appelée Africa4Future, qui sélectionne et incube des start-up prometteuses en Afrique. Nous travaillons avec Air Algérie depuis des années et espérons étendre notre collaboration à l’ensemble des secteurs de pointe en Algérie, afin d’accompagner le pays dans ses programmes de modernisation des capacités aériennes et spatiales. Au-delà de l’aviation commerciale, Airbus fournit les hélicoptères et avions militaires les plus efficaces pour servir, protéger, et mener à bien des missions humanitaires, même dans les environnements les plus difficiles d’accès.
A. A.

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