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Rubrique Ici mieux que là-bas

Diaspora et paranoïa

Franchement, peut-on commenter tranquillement, sereinement, les mesures assez sévères qui accompagnent la réouverture des frontières de l’Algérie ? Peut-on en parler d’un point de vue strictement sanitaire, sans leur donner un contenu politique, pourtant inévitable ?
Dans le double contexte de tension dû, d’une part, à la crise sanitaire et à ses conséquences désastreuses sur bien des plans et, d’autre part, au Hirak et à l’insensée diabolisation de la diaspora algérienne, il est difficile, en effet, d’aborder la question sans faire ni subir de dégâts.
D’un côté donc, la crise sanitaire qui aurait dicté la fermeture des frontières, laquelle a jeté à travers le monde des milliers d’Algériens bloqués sans ressources et surtout sans pouvoir compter sur personne, pas même sur les représentants de leur État. Et pendant ce temps, semble-t-il, certains n’ont eu de cesse  de  jouer à saute frontières. On dit même qu’il y en a qui se seraient autorisés à se rendre à Paris pour… une simple consultation dentaire. On dit…
En revanche, des milliers d’Algériens résidant en Algérie et bloqués à l’étranger restent encore en rade comme s’ils étaient apatrides, lesquels apatrides d’ailleurs peuvent, eux, au moins espérer le soutien des organisations internationales. Quant aux Algériens résidant à l’étranger — membres de cette fameuse diaspora dont le nom est devenu symbole de blasphème antipatriotique, c’est encore pire. Contraints de rentrer chez eux pour des impératifs familiaux ou sociaux, leur situation a carrément basculé dans l’absurde. Ils auraient rallié la Tunisie pour rentrer illégalement dans leur patrie, pratiquant ainsi de la harga à l’envers. Entrer illégalement, sortir illégalement, si les portes du pays demeurent closes, celles de l’absurde sont grandes ouvertes.
Les images de ces Algériens se bousculant, sans aucune précaution sanitaire, devant l’agence d’Air Algérie de Marseille, expriment un désarroi qui annihile tous les discours triomphalistes tenus à partir d’Alger. Ces discours ne cessent de nous dire à quel point nous avons la chance d’être gouvernés par ceux qui nous gouvernent. Le reste des mesures, ressenties par la plupart des émigrés comme une injustice, au lieu de prêter à débat, deviennent au contraire des prétextes à excommunication. Ce n’est pas pour rien qu’il y a eu des protestations devant les représentations consulaires algériennes à l’étranger. Imposer plusieurs jours de confinement dans un hôtel à des dizaines d’euros la nuitée, payables en devises, au moins deux tests réglables  eux aussi en monnaie convertible, sans compter le prix des billets qui atteignent des sommets, voilà une façon rédhibitoire de décourager le retour au bercail. On nous dit que la faute en incombe à la rigueur sanitaire et que l’Algérie n’est pas le seul pays au monde à pratiquer de telles exigences, c’est sûrement vrai mais il n’en demeure pas moins que la diaspora se sent larguée et pour tout dire indésirable. D’ailleurs, des commentaires sur les réseaux sociaux de profils louches, servant sûrement des desseins aisés à identifier, parachèvent cette attaque en règle contre la diaspora en faisant un ramassis de trafiquants de devises et de parasites.
On aura rarement vu un pays qui se construit rejeter à ce point ses ressortissants qui travaillent et vivent à l’étranger. Cette attitude d’ostracisme incompréhensible, de dénigrement de la diaspora relèverait presque d’un syndrome paranoïaque. Elle est en tout cas clairement antipolitique et antiéconomique. Tous les pays du monde qui, comme l’Algérie, ont la chance d’avoir une élite dans tous les domaines, scientifique, technique, intellectuel, artistique, sportif, quelles que soient les raisons de l’immigration, cherchent à la faire revenir autrement que par la culpabilisation. Eh bien chez nous, parce que la diaspora a dans sa diversité aussi étendue que celle des Algériens en Algérie, adopté le Hirak dès sa naissance, parce qu’elle fait corps avec son peuple, elle est rejetée et même criminalisée.
Comment, diantre, en est-on arrivé à ce point d’arasement politique et de confusion sémantique tel que le fait de contester le pouvoir – ce qui relève de la basique liberté d’expression — soit devenu synonyme de dénigrement du pays ? On se demanderait presque, au point où nous en sommes, quelle attitude ou quelle posture adopterait le pouvoir vis-à-vis de la diaspora si cette dernière s’était  majoritairement exprimée en faveur des élections législatives imminentes. Pour sûr que le discours à son endroit aurait été différent et les mesures plus clémentes. Le fait est que la diaspora, bien que vivant dans des systèmes étrangers, est habitée par l’Algérie, soucieuse de contribuer au changement si possible démocratique, et que les invectives et les exclusions par lesquels on veut la désigner comme un ennemi de l’Algérie sont politiquement primaires et moralement douteuses. Il est temps de raison recouvrer !
A. M.

 

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