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Rubrique Ici mieux que là-bas

La réinvention du zaïmisme

5 Juillet 2019.... A travers tout le pays, des millions d’Algériens descendent dans la rue pour donner encore plus de punch au 20e vendredi de protestation continue visant à chasser le système. En entier. Pas en vrac ! Mais ce dernier n’entend rien. Le contraire eût été fort étonnant !
Dans une atmosphère de fraternité pugnace et paisible, il n’est jamais loin, le souvenir de l'autre 5 Juillet, celui de 1962, journée de l’indépendance. Fête. Liesse. Joie. Vigilance et réflexe d’autodéfense aussi. Les piranhas ne sont jamais loin, eux non plus ! 
L’autre 5 Juillet, le fondateur. Libération. Oxygène. Mais très vite, l'air est de nouveau saturé d'une autre oppression, celle fraternellement exercée par les « nôtres ». Je te méprise khawa-khawa, c’est entre nous ! Vieille chanson, ça !
Ils s’y connaissent, les bougres, en hogra maison ! Cette oppression-là, comme dirait une fameuse publicité datant du néolithique boumedienien, est née chez nous, on peut lui faire confiance. Ton frère, c’est ton frère ! Au fil des ans, des avanies, des zigzags martiaux du pouvoir, les derniers échos euphoriques et un brin naïfs du 5 Juillet se sont effilochés puis carrément éteints, les derniers lazzis remisés au magasin des accessoires inutiles, les derniers applaudissements détournés. Les choses sérieuses pouvaient commencer.
Désormais, on pouvait crier, mais dans le désert : « Un seul héros le peuple .» Personne n'entend, là-haut. Et pendant qu'on laissait clamer aux étourdis ce qui bon leur semblait, on usinait les nouveaux « héros » dans les costumes de leaders. Le zaïmisme, avec sa grandeur illusoire et ses vicissitudes certaines, a ceci de pérenne et de fascinant, c'est que chaque zaïm algérien le dénonce d'abord comme un fauteur de faillite, puis le réinvente et se met au centre. L'histoire de l'Algérie tient là sa continuité, dans la réinvention perpétuelle du zaïmisme.
Le dernier en date, celui de Bouteflika, avec sa nouvelle religion d'adoration d'un cadre, a été l'apogée caricaturée de ce processus de sacralisation du pouvoir et d’auto-béatification des dirigeants. Ou comment on passe du séculaire au religieux  sans  avoir l’air d’y toucher !
Quand le dernier en date des responsables du FLN ose prier, urbi et orbi, que Bouteflika a été envoyé par Dieu, il ne reste qu’à conclure : « Amen ! »
Mais il vaut mieux pour lui qu'il y ait cru car, si c'est par opportunisme, on serait alors dans le délire.
Et voilà que, visiblement, la chaîne du zaïmisme semble se poursuivre dans une situation complètement inédite. Il faut remarquer, au passage, que dans l'histoire de l'Algérie, depuis les tout débuts du mouvement national et jusqu'à aujourd'hui, plus le zaïmisme est fort et empreint de religiosité, de plus haut tombe le zaïm quand l’heure de la chute advient. Messali Hadj a fini quasiment dans la peau du « traître » à la patrie, du moins à la patrie FLN. Boussouf, un zaïm interlope de l'ombre, a sombré dans l'opprobre. Ben Bella lègue à la postérité l'image de la fatuité. Il ne semble hélas, et il faut le regretter car cela ne peut pas se réduire à ça, rester de Boumediène que le fait d'avoir planqué les dépouilles des colonels Amirouche et Haouès dans une cave. Et le reste à l'avenant.
Le principe même du zaïmisme, c'est l'unicité absolue du leadership. Et pour cela, il faut éliminer les rivaux, les morts y compris si leur aura pouvait encore faire de l'ombre aux aspirants zaïms. 
5 Juillet 2019... Le peuple réalise que le mot d'ordre du zaïmisme reconnaissant qu'il n'y a qu'« un seul héros, le peuple » pouvait ne pas être un mot en l'air. Le peuple s'est chargé de démontrer qu'il y a une réalité. En se réappropriant le 5 Juillet comme symbole de la lutte pour l’indépendance reprise aux héros autoproclamés par le pouvoir du zaïmisme, les Algériens, réveillés d'une longue torpeur, renouent avec ce lien - que les pouvoirs ont toujours conservé, platonique -, avec les sources de Novembre. Et ce lien, gardé sous séquestre, vient d’être, une fois de plus, absurdement rompu avec l'arrestation du commandant Lakhdar Bouregaâ qui incarne, avec d'autres comme Djamila Bouhired et Louisette Ighil Ahriz et d'autres encore, la continuité de la Révolution algérienne dans le mouvement du 22 février. En tentant de rompre ce lien de continuité, non seulement on se pose en source de légitimation par zaïmisme mais on vide aussi, de façon collatérale, de son sens libérateur le soulèvement des Algériens contre le colonialisme français. L’atteinte aux symboles peut avoir des conséquences inattendues. 
On en est à cette intersection. D'un côté, un peuple qui, sage et pugnace, démontre qu'il a davantage le sens des responsabilités que ceux qui le gouvernent de fait, et de l’autre, des gouvernants démangés par la tentation du zaïmisme se disant, sans doute, que leur heure a sonné. Mais chaque vendredi confirme que celui qui compte seul se trompe fatalement.
A. M.

 

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