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Rubrique Tendances

C’est plus pire !

À peine mon popotin mis face à l’ordi, ma petite voix, plus insolente que jamais, me chuchote à l’oreille : « Quoi, encore ? Tu vas nous bassiner avec le Covid-19 ? Suffit ! Tu ne vas pas t’y mettre, toi aussi ! Parle-nous de ton insecte préféré, la cigale. Puis, on ne dit pas « plus pire ». Revois un peu ton latin ! Laisse-toi aller, vieux, regarde le jour de l’œil le plus optimiste. Ton toubib ne cesse pas de t’exhorter à positiver. Alors, positive à fond ! Souris à la vie, elle te sourira. »
Waouh ! Ma petite voix a dans le coffre. J’ai bien envie de m’en débarrasser à jamais. Je n’y arrive pas. Nous sommes un vieux couple, lié pour la vie. À la vie, à la mort, comme on dit. Puis, dans mes moments de grande solitude, ma petite voix me tient compagnie. Un peu comme un chat qui ne dit mot, mais qui ronronne gentiment. Je serai malheureux sans elle. Néanmoins, mon toubib me conseille de ne pas trop l’écouter. Je vois d’ici mon ami de Tlemcen faire de l’analyse d’estaminet en lisant ce texte. Ça me fait sourire. Il n’y a rien à analyser, ya kheï ! C’est une somme de jérémiades qui me sauve la vie. Tout ceci grâce à ma petite voix !
Revenons à nos moutons. Mais de quoi vais-je parler, parbleu ? Des vacances au bord de la grande 
bleue ? Je n’ai plus le cœur à faire la bronzette idiote et de voir ceux qui montrent leurs biscotos ou de se la jouer à la Ronaldo. De la lecture ? Je lis à me crever les yeux, et je ne retiens rien de mes lectures. Un fusible a sauté quelque part dans ma petite tête. Du  cinéma ? Indiquez-moi l’adresse d’un cinéma ; puis par ces temps « covidés », il n’est pas conseillé de se frotter aux autres. De théâtre ? Kateb Yacine a joué sa dernière pièce. Et Alloula a été victime des faiseurs d’éternité. Des sorties en forêt ? J’aurais peur de me retrouver, seul, ou en famille, dans une de nos forêts. Oui, j’aurais peur comme ça ; parce que j’ai intériorisé la peur ; cette dernière guide mes pas. Me rendre à Alger, c’est déjà un projet pour moi. De l’analyse (culturelle, politique, sociale…) ? Il n’y a rien à analyser, vraiment rien. Quand je jette un regard alentour, j’ai un goût de cendre dans la bouche. Quand je jette un regard sur mon parcours (c’est celui de ma génération), je me vois en train de courir derrière un sac troué d’illusions ; je n’ai rien pris de mes rêves ; je me retrouve avec une main devant et une main derrière. Dès lors, je n’ai rien à analyser ; je parle des petites choses de la vie. Je m’accroche à ces petits riens. Ça me rassure. Et ça me donne envie de continuer. 
Ihi, pour cet espace de parole, j’ai juste envie de parler du Covid-19 qui, inexorable et impassible, fauche des vies à  longueur de journée. J’ai entendu l’autre dire : « C’est pire, ailleurs. » Tiens, ça me fait une belle jambe, lui dis-je. Puis, je vois dans la rue des citoyens, sont-ils vraiment citoyens ? ou juste des administrés qui ne marchent que sur injonctions, qui se dirigent vers le centre-ville, en sifflotant, content d’eux-mêmes, sans masque sur le nez. Je ne sais pas à quoi ils pensent. Ils vont là où se concentrent la population de la ville consolider les lieux possibles de la contamination. 
J’ai juste envie de prendre un mégaphone, de l’introduire dans l’oreille de ces énergumènes, et de leur crier à leur faire péter le 
tympan : « Mets un masque ou reste chez toi, bougre  d’âne et bougre d’andouille. La situation est assez compliquée, ne rajoute pas ton idiotie. » C’est juste une envie. Je ne pourrais jamais faire une chose pareille. Aussi, quand je suis dehors, j’ai l’impression d’être épié par ce « monstre mutant et intelligent », comme le surnomme les spécialistes. Je le vois derrière cet arbre là-bas.  Non, il est tapi derrière la voiture bleue ; il attend que je passe près de lui pour m’alpaguer. C’est peut-être de la paranoïa. Tant pis, j’assume ma parano. Je change de trottoir. Je le vois de ce côté-ci, aussi. Au secours, on est encerclé. Et l’autre gus, fier de son allure, continue de marcher et de siffloter la bouche ouverte et le nez en l’air.
Aujourd’hui, je mets deux masques. Dans ma petite tête, je me dis que c’est plus sûr. Je vais chez le boulanger. Avant de rentrer, je me lave les mains avec le fameux gel. Ah, une connaissance vient me saluer. La petite voix me dit tout sourire : « Que vas-tu faire, 
maintenant ? » Rapidement, je me relave les mains. Il me tend le poing pour le salut. Oh, non, je mets ma main derrière mon dos. Je ne veux pas de cet élan forgé par l’habitude. Je lui parle des gestes barrières. Il se rapproche de moi, je recule. Je vois ses yeux se durcir. Pour finir, il me traite de peureux. De lâche. De poltron. De c…. molle. Je ne réponds pas. Je ne vais pas donner du coup de poing, tout de même. Je remets une couche de gel. Je rentre chez le boulanger. Je prends mes baguettes, la peur au ventre. Pour tout vous dire, j’ai même pensé à laver le pain avec la solution « hydroalcoolique ». 
Un ami a été contaminé. Il est hospitalisé. J’ai eu l’information en retard. Son téléphone est éteint. J’appelle sa fille. Elle se trouvait à côté de lui. Comment est-ce 
possible ? On admet des visites dans un service Covid ? Je ne comprends plus rien. La seule chose dont mon ami a besoin pour le moment, selon sa fille, c’est d’un concentrateur d’oxygène. « Je l’achète quel que soit son prix », me dit-elle dans un souffle. Où vais-je trouver cet appareil ? J’ai appelé les amis, en vain. J’ai écouté le Premier ministre rassurer le peuple. Je veux bien. Ne pourrait-il pas fournir à mon ami ce concentrateur d’oxygène ? Si j’ai bien compris les propos du Premier ministre, la situation est maîtrisée. Pourquoi donc ces appels de détresse qui sortent de partout ? Un effet des réseaux sociaux ? Je veux bien qu’on m’explique. 
Je veux surtout que l’oxygène soit disponible en permanence pour sauver le plus grand nombre. Au fait, s’il y a un esprit supérieur qui a compris cette histoire d’oxygène, qu’il m’explique. L’Algérie a offert à la Tunisie de l’oxygène, alors que nous en manquons. C’est bien d’aider le voisin, mais « le croyant commence par soi-même ». Faisons une prière collective pour qu’il pleuve de
l’oxygène ; d’une prière deux coups. 
Y. M.

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