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Rubrique Tendances

Journée ordinaire d’un confiné au temps du corona(5)

J’entame ma cinquième semaine de confinement. Je ne le dis pas avec de l’entrain. Je le dis contraint et obligé. Je ne m’enferme pas à la maison par plaisir. Je m’enferme parce que, dehors, il y a une méchante bête qui a des voies d’accès au corps faciles d’atteinte : la bouche, le nez et les yeux. Au fait, y a-t-il une maladie aussi dégueulasse que celle-ci qui s’insinue par les fosses nasales ? Il faut que je demande à mon toubib.
A la maison, tout se déroule dans une gestuelle répétitive stressante. Je ne sais pas pour vous, les amis, mais pour moi, si la matinée se passe sans esclandre, l’après-midi par contre prend l’horloge du salon à contre-pied. Le temps prend son temps. Il prend son pied. Et passe comme une catin, en se trémoussant le derrière. Incroyable comme les secondes changent de ton l’après-midi ! Et quand le crépuscule chasse la lumière du jour, je sens mes intestins se nouer comme si un malheur allait me tomber sur le crâne. Du jardin, je vois le soleil décliner à l’ouest, en traînant derrière lui une traînée de pourpre. Inutilement !
Aujourd’hui n’est pas le bon jour pour mon moral. Il pleut. Il vente. Je ne peux pas mettre le nez dehors. Quand je dis dehors, c’est juste à côté de mon chez-moi. De ma fenêtre, je vois les oliviers se tordre de douleur et perdre leurs fleurs. Aussi, je me suis doublement confiné. Je me suis mis à la téloche. J’ai écumé toutes les chaînes. J’ai zappé à me payer un tournis du diable. Et quand on zappe, on n’arrive pas à choisir tel ou tel programme. Au moment où tombe le bon film, juste pour passer le temps et faire défiler les heures, la parabole fait des siennes. Dès que l’action sent le roussi pour les mauvais, hop, la chaîne saute. Je suspecte le vent de faire bouger les antennes. C’est qu’ils sont sensibles ces champignons ! Je prends la télécommande, je tente de régler le schmilblick.  Hourra ! ça revient. Le film se déroule normalement, jusqu’au prochain cryptage. Et ainsi de suite, jusqu’à la nausée ! Surtout, ne me parlez pas de sieste. Oh ! nom d’un chien errant, j’en ai ma claque de dormir le jour. Oh ! comme j’aimerais dormir, comme tout le monde, la nuit. Et que je me débarrasse de mon insomnie. Pour rigoler, la petite voix intérieure m’a conseillé de prendre mon horloge biologique chez un horloger. Justement, j’en connais un de bon. Mais voilà, mon ami — le remonteur de temps — m’oriente vers un toubib. Vous savez quoi, j’ai laissé tomber l’affaire. Je préfère encore blanchir mes nuits que de me pourrir la vie avec des médocs. En termes de médoc, j’ai assez donné. J’en avale des pilules et autres cochonneries. Bref, passons ! 
En début d’année, je me suis offert un vélo d’appartement. Comme bonne résolution, je me suis promis de me remettre à transpirer un chouïa et maintenir un peu cette carcasse qui bat de l’aile. J’ai donc acheté cet accessoire. J’ai bien pédalé deux ou trois semaines. Puis, la résolution a pris la clé des champs. A mettre dans la case pertes et profits. Dans un coin sombre, le vélo s’est transformé en une nature morte. Œuvre d’art ? Plutôt objet encombrant ! Je remettais aux calendes algériennes mes séances de sport. Mon toubib n’arrêtait pas de m’exhorter à en faire trois fois par semaine, au moins trente minutes. Peine perdue ! J’ai même failli mettre une annonce sur Ouedkniss pour le revendre. Je ne l’ai pas fait. Je ne l’ai pas encore fait. Je raconte ça parce que j’ai remarqué que ma ceinture abdominale sort de la norme. Il me faut réagir. Janvier prochain, peut-être !
Je ne suis pas adepte de la théorie du complot. Ces jours-ci, j’ai suivi la polémique sur l’apparition du Covid-19. Un Nobel français a jeté un pavé dans la mare. Avant lui, Trump a carrément nommé la Chine. Il paraîtrait qu’à Wuhan, justement, d’un laboratoire, secret-défense, un méchant virus a pris la poudre d’escampette. Il aurait filé à la chinoise. Ce méchant virus s’attaque à tout le monde. Il ne fait pas de différence dans l’âge, le poids, la couleur des yeux, la taille et le sexe. Il mord à tout vent. Il rentre par trois orifices naturels : le nez, la bouche et les yeux. Encore heureux qu’il ne contamine pas par les oreilles. On l’aurait eu dans le baba ! Bref, ce méchant virus est un globe-trotter de première. En un rien de temps, il contamine tous les pays. C’est un passe-frontière. Il n’a pas besoin de visa. Il ne fait pas de différence entre les riches et les pauvres. Il a touché les États-Unis, la première puissance mondiale. Avec ses bombes atomiques. Son arsenal militaire. Ses génies de la  Silicon Valley. Sa CIA. Puis la NSA. Le FBI. L’inspecteur Harry. James Bond ! Arrête, celui-là est anglais. Oui, les Américains n’ont rien vu venir. Comme ils sont champions des complots, les Américains en ficèlent un énième. Je veux juste dire à Trump : ces complots nous dépassent, on ne veut pas savoir d’où sort ce méchant virus, on veut juste que vous nous donniez le vaccin. That’s all !
Je reviens chez nous. La situation est maîtrisée. Je ne remets pas en cause les dires officiels. La famille de la santé fait un sacré boulot. Il y a un manque de moyens, personne ne le nie. Je veux juste demander à l’ancien ministre de la Santé qui jurait, la main sur le cœur, en prenant toutes ses responsabilités, où sont les hôpitaux d’envergure mondiale pour lesquels il faisait l’éloge ? J’aimerais qu’il me communique leur adresse. Je veux juste aller faire un test de dépistage, histoire de rassurer l’hypocondriaque que je suis. Perso, je suis prêt à lui faire visiter les hôpitaux algériens, même en période de confinement. J’ai les adresses. C’est une autre histoire, n’est-ce pas ? Histoire du temps où on nous racontait des salades, juste pour le koursi. Or, ces gens-là oublient que ce sont des sièges éjectables. Même plus ! Je ne veux pas remuer le couteau dans la plaie. Mais on nous a fait avaler, du moins ils ont essayé, des crocodiles, en vain. Tout ça, pour le koursi ! 
Pour ne pas rajouter de l’enfermement au confinement, pour ne pas avoir à me rappeler des mauvais jours, de la mauvaise gestion, de la gabegie, du vol, de la prédation… Enfin, de tout ça, je propose quelques citations poétiques qui ont mis du baume sur une mémoire carnivore : «Ici le temps s’est tu/Il a perdu sa voix dans la psalmodie des vents/Le désert parle une langue ajourée/C’est une terre d’oubli/Où l’horizon limpide ne ferme pas l’œil» (Keltoum Stali).  Ou «Au corps/La fissure est délire d’arabesque/Et dansent les hyènes/Et chantent les sirènes/Au cœur/Les cimetières bâtissent des colonnes de cendre/Terre limpide de colère» (Rabah Belamri). Ou «L’hérésie taciturne d’un vent sans lieu/Dans les cales et soutes du négoce/Les accointances d’intérêts et les louvoiements bancaires/Sur les étals et comptoirs/Là où sonnent monnaies et devises/S’échangent portefeuilles de valeurs» Malek Alloula. Ou «Quelle araignée a tissé/Ses toiles élastiques/Sur les bouches/Pour que soit protégé/Comme un prophète» Mohamed Sehaba.
Y. M.

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